Ramadan : Un jour, une éthique
Cet article est publié en guise d’introduction à la chronique « Un jour, une éthique »
Jundub fils de Jinada, connu sous le nom d’Abu Dhar compagnon confirmé du Messager de Dieu, envoya son frère à la Mecque pour en savoir plus sur l’apparition du nouveau messager. Al-Boukhari consigne dans son Sahîh les événements de cette chronique d’après Ibn Abbas cousin proche du Prophète, paix et salut sur lui. « Prend-toi une monture, lance Abu Dhar à son frère, va dans cette vallée et inspecte moi la vérité sur cet homme qui prétend être prophète et recevoir la Nouvelle du Ciel. Ecoute ses paroles et reviens vers moi. » Le frère s’exécute, part jusqu’au Prophète, écoute ses paroles et revient vers Abu Dhar. « Je l’ai vu ordonner les nobles caractères, rapporte-t-il, et proférant des paroles qui ne sont pas de la poésie ».
« Tu ne m’en as pas dit assez ! » lance Abu Dhar. Aussitôt, il s’approvisionne, prend une vieille gourde avec de l’eau et se rend à la Mecque. Sur place il se dirige à la mosquée (Kaaba) à la recherche du Prophète. Sauf qu’il ne l’a jamais vu ! Il se réserve néanmoins, de demander quoi que ce soit aux habitants. La nuit le rattrape sans succès. Il se résigne à s’allonger dans la cour.
En ce moment, Ali l’aperçoit. Devinant qu’il fut un étranger, Il l’accompagna chez lui. En chemin, aucun d’eux n’a tenté d’en savoir plus sur l’autre. Ali par hospitalité, semble-t-il, et Abu Dhar par peur qu’il ne lui renvoie la question. Le lendemain matin Abu Dhar pris sa gourde et son viatique et repris le chemin de la mosquée. Il passe la journée entière sans rencontrer le Prophète. Il s’allonge en fin de journée au même endroit que la veille. Ali l’aperçoit à nouveau. « Monsieur ne connaît-il toujours pas sa demeure ? » s’adresse-t-il à l’inconnu en guise d’invitation. Il le soulève et l’accompagne chez lui sans que l’un n’interroge l’autre sur son identité. Toujours !
Le troisième jour, le soir, la même scène se reproduit et Ali de réitérer son invitation. En chemin Ali lui demande : « Pourrais-tu me faire part de ce qui t’amène ? » « Pas si tu ne me fais pas la promesse de me guider », rétorque Abu Dhar. Ali consentît et Abu Dhar lui confia l’objet de sa quête. « C’est la vérité, confirme Ali, il est le Messager de Dieu, paix et salut de Dieu sur lui. Le matin suit moi, poursuit-il. Si j’aperçois une chose qui me ferait craindre pour toi je fais mine de verser de l’eau. Sinon, si j’avance suis-moi puis entre là où j’entre. » Le matin, comme convenu, il le suit jusqu’à ce que Ali entre chez le Prophète, paix et salut sur lui, et il fit de même.
En présence du Messager de Dieu, Abu Dhar écoute ses paroles et atteste sans tarder l’attestation de foi. « Retourne chez ton peuple, informes-les, jusqu’à ce que mon commandement te parvienne », conclût le Prophète. « Par celui qui détient mon âme, répond Abu Dhar, je crierai vérité en leur sein. » Il quitta alors vers la mosquée où il cria au plus fort de sa voix : « Je témoigne qu’il n’y a divinité sinon Dieu et que Muhammad est le Messager de Dieu. » La foule s’est levée alors et il se fit tabasser à même le sol. Al-Abbas (oncle du Prophète) s’est interposé en le couvrant pas son corps en disant : « Malheur à vous ! Ne savez-vous pas qu’il est de Ghifar, point de passage de vos commerces vers le Shâm (Jordanie) ? ». Ainsi sauvé, Abu Dhar reproduit la même scène le lendemain. Al-Abbas s’interposa une nouvelle fois pour le sauver. Fin de la chronique ! Décidemment il ne s’agit pas que de paroles, mais d’une incarnation de celles-ci par ceux qui ont suivi le Messager.
Unays, frère d’Abou Dhar, a-t-il raison d’identifier la mission du Messager de Dieu à l’accomplissement des bonnes morales ? Oui. « Je n’ai été envoyé que pour accomplir les bonnes morales. » affirme le Prophète dans un récit authentique rapporté par Al-Boukhari dans son ouvrage al-Adab. Outre, « le croyant peut, grâce à sa bonne éthique, atteindre les degrés de celui qui jeûne et passe ses nuits dans la prière » (1)
La prière, le jeûne, l’aumône, le pèlerinage et tous les actes d’obéissance relevant de l’enseignement de l’Islam ont tous pour vocation de purifier l’âme et le cœur et de parfaire les comportements.
Concernant la bonne éthique, l’imam Qortobi, paix à son âme, dit dans son livre Al-mofhim : « D’une manière succincte, avoir un bon caractère, signifie être exigeant par rapport à son ego passionnel et équitable envers autrui. Et d’une manière détaillée, cela signifie la compassion, l‘indulgence, la générosité, la patience, la miséricorde, la clémence, l’amabilité (courtoisie), la douceur, c’est aussi le fait de supporter le mal des autres, les épreuves et de rendre service. Tandis que les caractères méprisables sont le contraire ».
La bonne éthique, une bonne œuvre bien récompensée
« Certes, tu es porté par une morale magnanime » (2) complimente Dieu, exalté soit Son Nom, Son auguste prophète.
Dieu invite aussi les fidèles à exceller dans leurs conduites : « Décline de la plus belle manière et tu verras ton ennemi se muer en fervent allié !» (3)
Le Prophète, paix et salut sur lui, était un exemple parfait du bon comportement. Ses bonnes manières et ses nobles caractéristiques ne furent réunies chez aucun autre. Quelques compagnons décrivirent son comportement en ces termes : « Le Prophète n’était ni pervers, ni grossier, ni criard dans les marchés. Il ne répondait pas au mal par le mal, mais il pardonnait et ne tenait pas rigueur… Jamais de son vivant, il n’a frappé par sa main qui que ce soit ni femme, ni domestique… Si quelqu’un lui fait du mal ou du tort, il ne se vengeait jamais, sauf si l’une des limites sacrées de Dieu était transgressée auquel cas il se venge pour Dieu » (4). Anas ibn Malik, que Dieu l’agrée, rapporte pour sa part : « J’ai servi le Prophète pendant dix années. Par Dieu ! Il ne m’a jamais dit : Ouf ! Et ne m’a jamais interpellé en ces termes : Pourquoi as-tu fait cela ? Ou tâches de faire cela ? » (5)
Le Prophète, paix et salut sur lui, qui jouissait du meilleur comportement, exhortait ses compagnons à s’équiper de la bonne éthique, en citant ses mérites : « Voulez-vous que je vous indique qui m’est d’entre vous le plus cher, qui sera le plus proche de moi au Jour de la Résurrection ? Et il a répété cela deux ou trois fois. Les gens présents lui ont dit : Oui, ô Envoyé de Dieu. Il leur a dit : Celui d’entre vous qui a la meilleure éthique » (6)
La bonne éthique est la caractéristique des croyants « accomplis » (kamil) comme nous l’enseigne le Prophète, paix et salut sur lui : « Les croyants qui ont la foi la plus parfaite sont ceux qui jouissent du meilleur caractère, et les meilleurs d’entre vous sont les meilleurs envers leurs épouses. » (7)
Dieu a assigné dans la bonne éthique un moyen pour mériter les hauts degrés « Hâtez-vous vers une absolution de votre Seigneur et un paradis ayant la largeur des cieux et de la terre ayant été aménagé pour les gens pieux. Ceux qui dépensent dans la richesse et la pauvreté, qui refoulent leur colère et qui pardonnent aux gens. Et Dieu aime les bienfaisants » (8)
En ce mois béni de Ramadan, puisse Dieu, par l’accomplissement des bonnes œuvres, purifier nos cœurs et parfaire nos comportements, et nous compter parmi les bienfaisants.
(1)Rapporté par Abu Dawud, selon Aicha
(2) Coran : Qalam, V4
(3) Coran : Foussilat, V34.
(4) Rapporté par Muslim, selon Aicha
(5) Rapporté par Muslim
(6) Rapporté par l’Imam Ahmad
(7) Rapporté par Tirmidhi
(8) Coran : Al Imran, V133 et 134