« Et si Mes serviteurs t’interrogent sur Moi… »
En cette période bénie du Ramadan, nous demandons l’aide de Dieu pour qu’Il nous aide afin que notre adoration soit au niveau de ce qu’Il attend de nous.
Dans le passage du Coran qui évoque la prescription du jeûne de ce mois, Dieu nous dit : « Et si Mes serviteurs t’interrogent sur Moi… alors Je suis tout proche : Je réponds à l’appel de celui qui Me prie quand il Me prie. Qu’ils répondent à Mon appel, et qu’ils croient en Moi, afin qu’ils soient bien guidés. » (1)
Ce verset extraordinaire contient la clé de la foi et de la certitude, une clé de voûte pour emprunter le chemin de la Foi et le chemin vers Dieu. La clé réside dans la demande même, c’est-à-dire que la question posée n’est pas une question ordinaire : Peut-on être proche de Dieu et comment ? Porter cette demande en soi, c’est la clé dans la question du sens de la vie qui ouvre une porte et une voie vers la connaissance de Dieu.
Il y a donc ici une condition qui est indiquée par Dieu à savoir la demande de cette proximité, cette volonté d’aller vers Lui et d’aller à la quête de cette clé. Elle émane d’un besoin existentiel : on peut comparer cette demande à d’autres demandes qui sont d’un autre registre. C’est le cas de ceux qui ont posé des questions futiles ou polémiques (pour défier les Prophètes) dans la sourate al Isra : Et ils t’interrogent au sujet de l’âme, – Dis : “l’âme relève de l’Ordre de mon Seigneur”. Et on ne vous a donné que peu de connaissance. (2)
Dans la question posée dans la sourate Baqara, la réponse est toute autre : Je suis tout proche.
Pour connaître Dieu comme il se doit, il n’y a qu’une seule porte, celle de La Révélation. Les autres voies sont sans issue dans le labyrinthe infini de la théologie faisant appel à la raison, la philosophie ou aux mythes sans fondements (panthéisme, polythéisme ou encore nier toute divinité et rester prisonnier d’une raison par nature limitée…). Les gens se sont ainsi dispersés.
Pourquoi Dieu nous dit qu’il n’y a qu’une seule voie ? L’homme est limité en moyens, en temps et en espace pour accéder à cette Vérité et à cette voie qui le dépasse. Il a donc besoin d’une aide divine. Cette réponse émane directement de Dieu : pour les gens doués de raison, cette réponse divine est un soulagement. L’histoire de l’humanité nous le montre bien : qu’est-ce que la durée de vie d’un homme à côté de l’âge de la Terre, des arbres et des autres créatures qui nous entourent ?
Le prophète (paix et salut sur lui) nous invite à méditer sur les créatures de Dieu, ce qui est une démarche plus fertile pour comprendre le sens de La Révélation plutôt que de méditer sur l’essence divine. Dieu nous adresse Sa Parole pour qu’Il Se dévoile à nous selon la capacité humaine. Dans le verset cité plus haut, Dieu nous parle de Lui et nous annonce Sa proximité.
Connaître Dieu sans Révélation est une équation, ou une entreprise inatteignable pour l’Homme, car limité dans ses capacités. Cette invitation est adressée à l’Homme alors que la montagne ne saurait soutenir le poids de la Révélation :
Si Nous avions fait descendre ce Coran sur une montagne, tu l’aurais vu s’humilier et se fendre par crainte de Dieu. Et ces paraboles Nous les citons aux gens afin qu’ils réfléchissent (2)
Et lorsque Moïse vint à Notre rendez-vous et que son Seigneur lui eut parlé, il dit: “Ô mon Seigneur, montre-Toi à moi pour que je Te voie!” Il dit: “Tu ne Me verras pas; mais regarde le Mont: s’il tient en sa place, alors tu Me verras.” Mais lorsque son Seigneur Se manifesta au Mont, Il le pulvérisa, et Moïse s’effondra foudroyé. Lorsqu’il s’en fut remis, il dit: “Gloire à Toi! Je reviens à Toi ; et je suis le premier des croyants” (3)
Comment donc recevoir ce bienfait ? Allons-nous récolter les fruits sans perdre de temps ? La dérive serait de s’arrêter à l’interprétation des questions anthropologiques ; cette dérive eut lieu dans notre histoire musulmane lorsque certains savants se sont interrogés sur la façon dont Dieu a pu S’établir sur le Trône par exemple, ou comment est La Main de Dieu. Ces polémiques qui ont généré des dérives, nous font perdre du temps et nous font passer à côté de l’essentiel. L’imam Malik disait : Il nous a informé sur le fait qu’Il S’est établi sur le Trône et non sur le comment. Se poser cette question est une dérive en matière religieuse.
L’âme dans la recherche de la connaissance, c’est l’amour
Il y a une âme dans la recherche de la connaissance de Dieu, c’est l’amour. Dieu vient vers nous pour nous donner et nous combler davantage. Comment ne pas L’aimer alors qu’Il nous a comblés. Le sentiment de reconnaissance (Choukr) mène vers l’amour et la réponse de Dieu est qu’Il est tout proche de nous (Qarib). Les signes de cette voie sont ponctués par des jalons : la clé qui ouvre la voie est La ilaha illa Allah et il y a ensuite des actes qui jalonnent le chemin à travers d’abord les actes obligatoires et ensuite les actes surérogatoires, comme l’indique le hadith d’après Abû Houreirah, où le Prophète (paix et salut sur lui) a dit : « Le Très-Haut a dit : Quiconque manifeste une hostilité à un de Mes amis [Walî], Je lui déclare la guerre. Mon serviteur ne s’approche pas de Moi par une chose plus aimable à Moi que ce que Je lui ai imposé, et Mon serviteur ne cesse de s’approcher de Moi par les œuvres surérogatoires jusqu’à ce que Je l’aime. Or, lorsque Je l’aime, Je suis son ouïe par laquelle il entend, sa vue par laquelle il voit, sa main par laquelle il attrape, son pied par lequel il marche. S’il Me demande quelque chose, Je lui donne certainement, et s’il cherche refuge auprès de Moi, Je le lui accorde. » (4).
Ici, Dieu nous informe des actes qu’Il aime que nous fassions. Il nous incombe donc d’agir en conséquence pour avancer dans cette voie. Être dans cette voie est une confirmation que Dieu nous aime. Les actes obligatoires sont ainsi complétés avec les actes surérogatoires jusqu’à ce que Dieu nous place parmi Ses intimes : ‘jusqu’à ce que Je l’aime’…
La raison est un outil à utiliser à bon escient. Il faut lui octroyer sa juste place sans l’épuiser dans des questions métaphysiques (telle que l’essence divine) qu’elle ne peut résoudre. Elle ne peut donc être érigée comme un absolu capable de saisir. L’essentiel est de savourer les bienfaits de Dieu sans se torturer avec des questions métaphysiques : l’essentiel est d’être un intime de Dieu. Je marche, je regarde grâce à Dieu. Ma force et capacité de faire est ainsi multipliée par la grâce de Dieu. Dieu promet d’exaucer, de protéger, parce que l’on devient parmi Ses intimes dans cette voie qu’on a empruntée depuis qu’elle s’est annoncée à nous.
Les grands secrets de notre religion se manifestent par des actes simples à la portée de tout le monde. Le jeûne, la prière, un sourire sont autant d’actes à portée de main. L’essentiel est d’avoir cette volonté d’aller vers Dieu. Il faut des connexions avec un cœur ouvert qui reçoit sa nourriture spirituelle quotidienne. Le Ramadan et le jeûne ont des secrets pour vivre cette certitude, renforcer et donner un nouvel élan et être fort intérieurement pour affronter avec sérénité les épreuves extérieures et ne pas être déstabilisé.
Plus on gagne en taqwa (piété) en accomplissant nos devoirs, plus on se rapproche de Lui et l’on reçoit Ses bienfaits. L’amitié de Dieu est le fruit de l’humilité et la gratitude et non pas la prétention : le Prophète (paix et bénédictions sur lui) priait jusqu’à saigner des pieds pour être un serviteur reconnaissant vis-à-vis de Dieu.
L’amour de Dieu est le pivot autour duquel gravite et tourne l’essence de la religion. Et l’amour du Prophète et suivre ses pas est un pilier solide. L’amour est donc une énergie renouvelable dans ce processus.
Emprunter ce chemin aujourd’hui… Quel équilibre entre raison, détachement et action ?
Cet équilibre fait partie de la nature humaine dont les besoins sont intrinsèquement déjà établis. Ce sont les choix de l’être humain qui mettent en berne certains éléments et suscitent un déséquilibre. Le besoin spirituel est inné chez l’homme mais son conditionnement le met en berne.
L’homme est en outre un être éminemment social. Dieu a créé le monde en mouvement et l’Homme est aussi en mouvement. Le devenir vers la vie dernière est aussi un mouvement. Qu’est-ce qui motive donc le mouvement et l’action de l’Homme ? c’est le rôle de l’éducation et le fruit du travail sur soi qui orientent les actes telle une boussole et assurent l’équilibre. Cet équilibre est une quête et une exigence dans la voie du cheminement. Elle consiste à accorder le droit à chaque chose comme nous l’enseigne le Prophète.
La participation (œuvre sociale, citoyenne, politique…) pour être utile à tous (sans particularisme aucun) dans la société nourrit la spiritualité et la spiritualité nourrit l’intention et donne sens et profondeur à l’action participative. Cet équilibre porté par l’amour et la bienveillance est générateur de nouveaux modèles où l’être humain retrouve sa place, sa dignité et son humanité.
(1) Coran : Baqara, V 186
(2) Coran : Al Isra – V85
(3) Coran : Al A’raf – V143
(4) Rapporté par al-Bukhârî
Salam, parfois un enseignement lumineux passe devant nos yeux, d’une telle profondeur, d’une telle perspicacité, d’une telle ampleur, qu’on ne le voit pas…
Pourquoi ? Peut-être faut-il que notre vie nous place dans une situation de demande, une situation de détresse spirituelle, à l’image de celui qui après avoir cherché se trouve perdu au fond d’un trou duquel il ne trouve aucune prise pour pouvoir en sortir. Un trou si profond, si obscure, si loin de toute vie, qu’enfin, dans les ténèbres de notre ignorance, dans la petitesse de notre compréhension, dans l’impuissance de notre état, nous recommencions à voir, à entendre mieux que jamais. Je pense qu’un tel état aurait non seulement le mérite de remettre les pendules à l’heure en dessinant le cap à suivre : Dieu, mais aussi il nous rendrait bien plus attentif à ses trésors qu’on retrouve dans cet article, car si retrouver le cap dans sa vie est nécessaire, Dieu a mis des conditions et des causes à notre disposition pour sillonner ce chemin afin que cet état qui m’a permis d’y voir clair, ne soit pas une simple brise de passage, un état d’âme, qui aussitôt passé me fait retomber dans la banalité d’une vie source de regrets énormes dans la vie Dernière.