Préserver les liens de parenté
Dieu a crée l’homme de sorte qu’il vive en communauté. Son rapport avec son entourage le rapprochera de Dieu ou l’éloignera. La relation spirituelle à Dieu est indissociable de la relation avec les autres et du comportement que l’on a en société. A ce titre, une attention capitale est portée à la relation avec les parents.
La bonté envers père et mère
Le saint Coran associe dans son texte le monothéisme pur et la bienfaisance envers les parents comme l’illustrent plusieurs versets :
Ton Seigneur a décrété : « n’adorez que Lui; et (marquez) de la bonté envers les parents » : si l’un d’eux ou tous deux doivent atteindre la vieillesse auprès de toi; alors ne leur dis point : « Fi ! » et ne les brusque pas, mais adresse-leur des paroles respectueuses. Et par miséricorde; abaisse pour eux l’aile de l’humilité; et dis : « Mon Seigneur, fais-leur ; à tous deux ; miséricorde comme ils m’ont élevé tout petit ».[1]
« Adorez Dieu et ne Lui donnez aucun associé. Agissez avec bonté envers (vos) père et mère, les proches, les orphelins, les pauvres, le proche voisin, le voisin lointain, le collègue et le voyageur, et les esclaves en votre possession, car Dieu n’aime pas, en vérité, le présomptueux, l’arrogant » [2]
Dieu nous ordonne de leur adresser une parole douce, une parole qui réjouit père et mère notamment lorsque ceux-ci atteignent un âge avancé. L’exemple nous est donné par le compagnon Abou Horeira qui disait à sa mère : « Que Dieu te fasse miséricorde pour m’avoir éduqué quand j’étais enfant ». Celle-ci lui répondait : « Que Dieu t’ait en Sa Miséricorde pour m’avoir rendu heureuse à un âge avancé ».
Cette recommandation divine d’être bienveillant envers les proches est vraie quelque soit leur confession. Asma demandait un jour au Prophète, paix et bénédictions de Dieu sur lui, si elle pouvait visiter sa mère qui était alors dans le clan adverse. Il lui recommanda de maintenir le lien de parenté. Tout musulman a le devoir d’être de bonne compagnie envers les parents: « Et si tous deux te forcent a M’associer ce dont tu n’as aucune connaissance, alors ne leur obéis pas; mais reste avec eux ici-bas de bonne compagnie »[3]
L’islam est basé sur la reconnaissance; être bienveillant envers les parents, c’est agir en reconnaissance envers ceux à qui nous devons tout après notre Créateur. La bonté envers eux est une des plus grandes œuvres d’adoration qui rapproche de Dieu. Le Prophète, paix et bénédictions sur lui, nous offre un bouquet de recommandations qui nous encourage dans ce sens :
Abdullah Ibn Masud a dit : « J’ai demandé au Prophète : quelle est l’œuvre la plus aimée de Dieu ? Il dit : La prière faite à son heure. Je dis : Et puis ? Il dit : La bonté envers les parents. Je dis : Et puis ? Il dit : Le combat au service de Dieu.»[4]
Selon le compagnon Abou Horeira, le Prophète, paix et bénédictions sur lui, a dit : « Quelle perte ! Quelle perte ! Quelle perte pour celui qui a un de ses deux parents ayant atteint la vieillesse et qui n’est pas entré au paradis. »[5]
Selon Anas, le Prophète, paix et bénédictions sur lui, a dit : « Celui qui aimerait bien qu’on élargisse sa subsistance et qu’on retarde l’échéance de sa mort, qu’il noue les liens de parenté ».[6]
A un homme venu prêter allégeance au Prophète d’émigrer à Médine et de s’engager dans le combat pour Dieu, le Prophète, paix et bénédictions sur lui, demanda : « As-tu un de tes deux parents encore en vie ? » Il répondit : « Oui, les deux même ». Il lui dit : « Ton combat est d’être auprès d’eux ».[7]
Ouceyr Ibn ‘Amr a dit: «’Omar Ibn Al Khattàb, quand lui venaient les délégations du Yémen, leur demandait: «Y a-t-il parmi vous Oweys Ibn ‘Amer?». Jusqu’à ce qu’il trouvât Oweys . Il lui dit: «C’est bien toi Oweys Ibn ‘Amer?» Il dit: «Oui». Il dit: «De la tribu de Mouràd et du clan de Qaran?». Il dit: «Oui». Il dit: «Tu as une mère?» Il dit: «Oui». Il dit: «J’ai entendu dire le Messager de Dieu (bsdl): «II vous viendra avec les délégations du Yémen Oweys Ibn ‘Amer, de la tribu de Mouràd et du clan de Qaran. Il était lépreux puis guérit n’en gardant qu’une marque de la grosseur d’un dirham. Il a une mère qu’il traite avec bonté, s’il faisait à Dieu un serment pour que Dieu exauce quelque chose, Dieu ne contredirait pas son serment. Si tu peux lui demander de prier pour ton pardon, fais-le». Aussi, te demandé-je de prier pour le pardon de mes péchés». Et c’est ce qu’il fit. [8]
La parenté spirituelle
Le verset de 15 de la sourate Luqman donne deux lectures du lien de parenté à préserver :
« Tiens leur bonne compagnie ici-bas. Et suis le sentier de celui qui se tourne vers Moi »
Au delà des liens du sang, il existe une catégorie de lien de parenté d’ordre spirituel. Le Prophète, paix et bénédictions sur lui, était un père pour les compagnons, sa venue à Médine a rayonné et fait jaillir une lumière comme en témoignaient les compagnons. Anas Ibn Malik disait : « le jour de son entrée à Médine, toute la ville était lumineuse. A sa mort, tout était devenu sombre si bien que nous nous croisions dans les rues sans nous apercevoir et nous saluer »[9]
La mort du Prophète, paix et bénédictions sur lui, était un bouleversement pour ces hommes qui n’avaient aucune crainte d’affronter les plus grandes armées, ils étaient devenus tels des orphelins qui avaient perdu leur père si bien que Omar avait brandit son épée prêt à s’en prendre à toute personne osant affirmer la mort du Prophète. C’est ensuite Abou Bakr, par sa proximité avec la personne du Prophète, qui a fait unanimité pour lui succéder. Il remplit alors pleinement son rôle spirituel, éducatif, politique, militaire, économique, social…
Par la suite, il était devenu de coutume lors des batailles de recenser chez les musulmans ceux qui avaient côtoyé le Prophète, puis ceux qui avaient côtoyé les compagnons puis ceux qui avaient côtoyé les successeurs. La victoire venait par ces gens là, pour leur piété.
Ce lien de parenté spirituel (ou de modèle) qui se traduit par une relation de maître à disciples, d’enseignant à étudiants ou encore de guide à initiés constitue une loi immuable que Dieu a instauré dans la création. Elle est vraie dans tous les aspects de la vie : pour apprendre une langue, pour apprendre un sport, un art, une technique.
Elle l’est encore plus quand il s’agit de connaître Dieu et de cheminer vers Sa proximité. Le chemin vers Dieu ne peut se faire sans un modèle vivant ; sans quoi Dieu n’aurait suscité de Prophètes, la simple descente d’un livre par les anges aurait suffi.
Le retour vers les sources ne peut se faire sans cette compagnie de modèles vivants dont les cœurs sont purifiés et dont le savoir est accompli pour pouvoir prédisposer la communauté à assumer le rôle que Dieu veut pour elle :
« Vous êtes la meilleure communauté qu’on ait fait surgir pour les hommes vous ordonnez le convenable, repoussez le blâmable et croyez à Dieu. »[10]
[4] Rapporté par Bokhari & Muslim
[5] Rapporté par Bokhari & Muslim
[6] Rapporté par Bokhari & Muslim