Mon père m’a rendu visite
– « Comment tu vas ? »
– « Un peu fatiguée, j’ai mis du temps à m’endormir.. »
C’est vrai, j’avais mis du temps à m’endormir, mais ma fatigue ne pouvait entraver cette joie immense que j’avais de le voir. Il était là, près de moi.
Un instant précieux. Aussi précieux que rare.
Sur la table, une assiette de gourmandises.
– « Tiens, prends-en, c’est moi qui les ai faits ! »
Je lui donne un de ces gâteaux et m’assois près de lui. Aussi près que je le pouvais. Je suis enchantée de voir son joli visage, celui que je me plaisais tant à contempler, avant.
Lui, va bien. Il ne parle pas beaucoup, mais ses gestes me suffisent et puis je sais qu’il est là pour moi, pour me rendre visite. Je me rends compte de cette faveur qui m’est donnée et me dis qu’il est bon de profiter de chaque instant. Alors, je lui prends la main. Et comme l’amoureuse qui retrouve son bien-aimé, je ne la lâche pas. Je regarde ses doigts et en les regardant je me dis d’en contempler chaque détail.
– « Tu sais, je travaille à l’Hôpital maintenant ! »
– « Oui, je le sais »
Sa réponse me bouleverse et me touche. Il prend donc de mes nouvelles ! Il sait ce que je fais et ce que je suis devenue, j’en suis ravie.
J’étais fière de lui annoncer cette nouvelle parce que je sais qu’il en aurait été fier lui aussi. Il sait bien quels vents et marées j’ai dû contrer pour en arriver là. Je voulais briller dans ses yeux. Lui prouver que tout ce qu’il a fait pour moi n’était pas en vain.
Complices, j’ai toujours ma main dans la sienne et me plaît à jouer avec ses doigts. Je la trouve belle sa main, moins abîmée qu’elle ne l’était auparavant.
Je passe ce moment d’amour et de tendresse avec lui jusqu’à ce qu’il faille partir. J’ai rejoint ma mère. Il n’est plus là. Son absence me transperce et cet instant si fort que j’ai partagé avec lui est révolu. C’est donc fini ? Déjà ?! Mes larmes coulent…
Je me réveille. Bouleversée par ce rêve que je viens de vivre. Ebranlée par sa présence que j’ai sentie bien réelle, mes larmes continuent de couler. C’est vrai, cette nuit je n’ai pas beaucoup dormi, mais cette visite me procure une énergie telle qu’il m’est impossible de retrouver le sommeil. J’ai bien tenté de refermer les yeux pour me replonger dans cette vision, mais rien n’y fait. Il n’est plus là, mon père.
C’était trop court, trop bref.
Louanges à Dieu. Gloire à Toi !
Je Le remercie pour ce moment magique et me lève, la larme à l’œil. Quel beau cadeau…
Que les louanges de Dieu soient avec toi, papa. C’est vrai, je n’ai pas toujours été expressive, manifestant l’amour et la fierté que j’ai toujours eus à ton égard. C’est vrai, j’aurai dû prendre ta main plus souvent et en contempler chaque détail. Remplir ma tête de mille et une images de plus de toi. J’ai préféré le silence. Un silence admiratif, mais un silence lourd à porter. Confinée dans un mutisme où chaque mot d’amour et de tendresse demandait un dépassement de soi.
Te rappelles-tu cette fois où je n’ai même pas réussi à te dire je t’aime ? Tu m’avais arrêtée, ému, en me disant « je le sais ! ». La gorge nouée, les larmes m’empêchaient de sortir ces trois mots de ma bouche. Tu sais papa, les mots pèsent lourds dans le silence…
Je ne t’ai jamais dit à quel point je suis fière de toi et à quel point je vis encore plus cette fierté par le fait que je sois ta fille. Ta sagesse, ton courage et ce même dans la plus dure des épreuves. Tu as supporté, tu as patienté. Fidèle à ce que j’ai connu de toi. Une montagne inébranlable ou du moins qui ne laissait paraître aucune faille, pour nous préserver. Ton optimisme et ton sourire. Tu sais ce qui me manque le plus ? Ton accueil, souriant, en me disant « bienvenue ma fille ! ».
Tout me manque. Absolument tout. Il ne me reste plus que des souvenirs, des images… et puis ces rêves de temps à autre qui me font sourire. Qui me font croire que si les cœurs sont liés rien ne peut entraver leur rencontre, ni même la mort. Je ne t’ai pas perdu. Je sais que je vais te retrouver puisque Dieu (le Très-Haut) nous le promet. On sera avec ceux qu’on aime…
Alors aujourd’hui, je m’efforce de faire honneur à cette moitié que j’ai de toi, et même si ce n’est pas toujours facile, sache que je n’ai pas oublié cette promesse que je t’ai faite.
Et pour rendre tous ces « je t’aime » que tu n’as pas eus et clamer mon amour, je te dédie mes invocations ainsi que celles de tous les cœurs qui me liront…
Ta fille.
Qu’ Allah swt lui accorde une place privilégiée auprès des Prophètes, des Martyrs et des Véridiques amine. Il est fier de toi Nurcan, j’en suis convaincue…
Ton amie qui ne l’oubliera pas dans ses invocations : Khadija
tu es croyante et Allah éprouve puis récompense les croyants; ton épreuve d’avoir perdu ton papa est récompensée entre autres par ces songes; paix à son âme et courage ma chérie; nous l’inclurons dans douaa arrabita , promis
Mes larmes ne sèchent pas. Quelle belle leçon nous donnes-tu, celle de témoigner son amour à ses parents chaque jour et de les choyer comme ils l’ont fait pour nous étant petits. Merci Nurcan pour ces mots toujours dits de ta part comme il le faut et quand il le faut. Si moi je suis fière de toi étant ta sœur alors ton cher papa doit l’être des millions de fois plus que moi. Que Dieu lui accorde Sa miséricorde et à tous nos papas.
Très émouvant !
Certainement l’un des meilleurs articles que j’ai pu lire sur le site.
Je vis à cet instant exactement la même douleur, le même manque et la même déception de ne pas lui avoir dit que je l’aime. J’espère qu’il m’a entendu ce jour-là et qu’il est fière de moi car je suis fière d’être sa fille de porter son nom, ses gènes et le perpétuer.
Merci mon père, je t’aime, je ne cesserai de t’aimer et de prier pour toi jusqu’à mon dernier souffle sur cette terre et à l’infini dans l’au-delà.
Qu’Allah soulage ta peine, te donne la force et te permette d’œuvrer pour Sa satisfaction et dans le chemin de la paix. Qu’Allah accorde à ton père, ainsi qu’au mien et à tous nos parents et proches le Firdaws. Qu’Il soit satisfait d’eux, illumine leur tombe, et les couvre de Sa miséricorde.
Quelle lourde épreuve que la perte d’un être cher ! J’ai écris cet article il y’a maintenant plus de 7 ans. Cela va bientôt faire 12 ans que mon père nous a quittés et entre temps j’ai perdu mon frère… celui à qui j’avais lu ces quelques lignes…. sur son visage son émotion, et dans mes souvenirs cet instant gravé à jamais…