PSM-Est : feuille de présentation – Interview de Mohamed Laafou
La jeunesse a une chose qui lui est propre ; dans certains cas c’est une qualité, dans d’autres c’est un handicap. C’est le zèle, la précipitation. On veut des résultats rapidement, on vit dans l’instantané, alors que la spiritualité c’est le contraire de tout ceci. Il s’agit d’un engagement jusqu’à la grande rencontre avec Dieu.
Mohamed Laafou, 30 ans et habitant à Mulhouse, est conférencier PSM et acteur associatif depuis plusieurs années dans la région Est de la France.
Nous lui avons posé quelques questions.
1) PSM-Est est une association régionale. Pouvez-vous nous dire comment elle s’est développée dans la région Est de la France?
PSM-Est a été officiellement créée il y a 2 ans, elle regroupe des membres habitants l’Alsace-Lorraine. Mais officieusement, l’âme et l’esprit de PSM-EST existe depuis bien des années et ses principales activités concernaient principalement les villes de Mulhouse, Strasbourg, Metz et Nancy.
Des rencontres spirituelles au travail associatif, chaque ville a pu se faire une expérience appréciée maintenant par de nombreux musulmans et non-musulmans. Il est donc apparu nécessaire de mettre en osmose toutes ces forces vives, afin d’avoir une vision plus large, plus équilibrée et surtout compléter nos qualités respectives afin d’offrir la plénitude de notre Message.
L’expérience du séjour de formation à Niederbronn a fait prendre conscience à chacun(e) combien l’union de nos pensées et de nos actions serait bénéfique aux musulmans et au reste de la société. L’avenir est prometteur et les actions régionales prévues pour l’année prochaine vont dans le sens de l’ouverture et de la responsabilité.
2) Vous vivez dans une région particulière de par son histoire. Comment la communauté musulmane vit dans cette région et quelles ont été les répercussions de la loi anti-foulard vis-à-vis du statut particulier dont jouit cette région?
L’histoire de l’Alsace-Moselle est particulière de par le concordat, mais il ne reconnaît, sur le terrain, que les cultes chrétien et juif. Actuellement, un élu Maire de Woippy a relancé le débat et veut que l’on reconnaisse le culte musulman et qu’il soit financé au même titre que les autres cultes. D’autres sont d’accord à condition que les imams soient formés en France.
Quant aux réactions suite à cette loi injuste, elles ont été les mêmes que dans le reste de la France, c’est-à-dire des manifestations et interviews avec des élèves et des responsables de la communauté musulmane. Au sein de la communauté, l’évènement a quelquefois été appréhendé de façon impulsive chez les élèves et avec beaucoup de légèreté par l’Etat. Ainsi, beaucoup d’élèves portant le foulard sont aujourd’hui laissées à elles-mêmes et ne sont soutenues que par des individus.
3) A travers vos conférences vous rencontrez beaucoup de jeunes. Comment est perçue la spiritualité par ces jeunes ? Y-a-t-il une réelle attente dans ce domaine ? Et comment pourriez-vous définir l’importance de la spiritualité dans la vie de l’être humain ?
Il faut savoir que par la bénédiction de Dieu, nous vivons une nouvelle ère pour l’humanité, celle de la recherche du sens et les jeunes n’en font pas exception.
Le bilan fait par des philosophes et d’autres dit que ce siècle sera spirituel.
La modernité dans son ensemble ne peut répondre aux questions existentielles pour lesquelles la raison ne suffit pas. Ainsi, les jeunes sont plus que jamais en recherche de vérité. D’autre part, l’Islam connaît un intérêt renouvelé et pas seulement chez les jeunes.
Maintenant, on peut quand même constater une confusion et des difficultés sur la notion de spiritualité. Pour certains, parler de spiritualité c’est faire référence aux derviches tourneurs ou le fait de s’isoler très loin du monde, pour d’autres c’est le fait de cumuler le savoir…
En fait, chacun, selon son vécu et son environnement, se donne une définition de la spiritualité, qui malheureusement n’est pas la plus juste.
L’autre constatation c’est que les jeunes non-musulmans qui entrent en Islam et qui ont déjà une expérience spirituelle, aussi minime soit-elle, se dirige directement vers l’amour de Dieu et ce qui les y rapproche, tandis que les jeunes issus de l’immigration, sûrement à cause des traditions, restent bloquer sur des choses secondaires et futiles.
Mais dans l’ensemble il y a une grande attente chez tout le monde et d’autant plus chez les jeunes.
Ils sont souvent étonnés de se rendre compte que l’on peut être proche de Dieu tout en étant épanoui dans sa vie de tous les jours ; et qu’au contraire, l’isolement et le dénigrement des autres n’est que le signe d’un déchirement intérieur. Le modèle ultime, le Messager de Dieu (Paix et bénédictions de Dieu sur lui), nous expose durant sa vie l’image d’un homme avec le Créateur dans son cœur, et au service des créatures, parlant leur langage, avec une vie sociale, une situation familiale…
Et c’est la réalité de la spiritualité, lorsqu’elle est vécue avec profondeur, elle offre à l’être humain l’épanouissement nécessaire afin qu’il soit une miséricorde pour tous ses frères et soeurs en humanité.
4) Pour un jeune peu instruit sur sa religion, s’engager peut signifier faire de nombreux sacrifices et vivre très différemment du reste de sa fréquentation. Qu’en pensez-vous ?
C’est malheureusement vrai puisque certains l’ont vu dans la vie de tous les jours. Combien de jeunes qui ont redécouvert l’Islam, sont devenus des « juges », pour qui le monde entier est devenu noir et ils ne voient plus que le courroux de Dieu qui va tomber sur les autres. C’est sûr qu’il n’y a pas un meilleur moyen pour faire peur aux jeunes et aux plus âgés.
Mais il ne faut pas oublier que l’environnement dans lequel nous vivons a des effets néfastes sur chacun d’entre nous (l’individualisme, l’égoïsme, le matérialisme, ne penser qu’à son petit quotidien…)
Il faut désormais que toute la société puisse voir au quotidien des musulmans vivant la réalité de la spiritualité et non plus être les théoriciens de la spiritualité.
Ce serait bien que l’on devienne des témoins silencieux, avec la langue, mais lumineux de par notre état.
5) D’après vous, comment concilier la spiritualité et la spécificité liée à la jeunesse que vous rencontrez tous les jours ?
La jeunesse a une chose qui lui est propre ; dans certains cas c’est une qualité, dans d’autres c’est un handicap : c’est le zèle, la précipitation. On veut des résultats rapidement, on vit dans l’instantané, alors que la spiritualité c’est le contraire de tout ceci.
Il s’agit d’un engagement jusqu’à la grande rencontre avec Dieu.
Cette recherche de maturité et de sagesse nécessite d’être en compagnie de ceux qui possèdent ces qualités.
Il est vital de rechercher une aide, une famille et un berceau spirituels dans lesquels on est baigné et protégé de tous les dangers.
Dieu ne dit-Il pas :
« Ô vous qui portez la foi, craignez Dieu, et restez en compagnie des véridiques. »