La France n’a pas respecté les droits de l’Homme en autorisant le licenciement d’une femme voilée
Le Comité des droits de l’Homme de l’ONU a critiqué le licenciement d’une salariée voilée de la crèche française Baby-Loup, estimant qu’il s’agit d’une « atteinte à la liberté de religion », et a invité la France à l’indemniser. Ce Comité, qui dépend du Haut-Commissariat pour les droits de l’Homme de l’ONU, est composé d’experts indépendants. Il rend des avis mais n’a pas de pouvoir de contrainte.
Licenciée en 2008, la Française Fatima Afif, avait été déboutée à deux reprises par les tribunaux. Mais dans un arrêt de mars 2013, vivement critiqué, la chambre sociale de la Cour de cassation lui avait donné raison, estimant que « s’agissant d’une crèche privée », le licenciement constituait « une discrimination en raison des convictions religieuses ». Son licenciement avait été confirmé par la Cour de Cassation en 2014.
Un voile « incompatible avec la stabilité sociale » ?
Dans ses conclusions, publiées le 10 août et que l’AFP a pu consulter, le Comité de l’ONU a noté que « l’interdiction qui lui a été faite de porter son foulard sur son lieu de travail constitue une ingérence dans l’exercice de son droit à la liberté de manifester sa religion ».
Le Comité, qui surveille l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, a observé par ailleurs que la France « n’explique pas en quelles mesures le port du foulard serait incompatible avec la stabilité sociale et l’accueil promus au sein de la crèche ». Il considère aussi que la France « n’a pas apporté de justification suffisante qui permette de conclure que le port d’un foulard par une éducatrice de la crèche porte atteinte aux libertés et droits fondamentaux des enfants et des parents la fréquentant ».
Le Comité attend une réponse de la France
Le Comité, composé d’experts, a donc conclu que l’obligation imposée à Fatima Afif de retirer son foulard lors de sa présence à la crèche constitue « une restriction portant atteinte à la liberté de religion » de la salariée, « en violation » du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Le Comité indique que la France « est tenue, entre autres, d’indemniser » Fatima Afif « de manière adéquate et de prendre des mesures de satisfaction appropriées, incluant une compensation pour la perte d’emploi sans indemnités et le remboursement de tout coût légal ».
Le Comité a souhaité que les autorités françaises lui transmettent, dans un délai de 180 jours, des renseignements sur les mesures prises.