Des listes musulmanes à l’assaut des législatives sous le feu des critiques
Loin des bisbilles entre partis traditionnels qui se disputent les parts de sièges à l’Assemblée nationale, des petits mouvements tentent de donner une existence à la parole des musulmans sur le plan politique. Alors que l’islam et les musulmans sont des sujets quasi incontournables de la vie politico-médiatique française, trois récentes formations politiques à référentiel musulman veulent se faire entendre. L’Union des démocrates musulmans de France (UDMF), Français & Musulmans et le Parti Égalité Justice (PEJ) ont alimenté les colonnes de la presse. Petite revue d’effectif.
Français & Musulmans, malgré un nom explicitement identitaire, réfute toute idée de communautarisme et se décrit comme un parti politique doté d’une éthique musulmane. Il refuse de s’inscrire dans le clivage gauche-droite. Plusieurs banques ont cependant refusé d’ouvrir un compte au nom du mouvement. Le président explique qu’il a dû solliciter la Banque de France afin d’obliger un établissement bancaire à lui ouvrir un un compte.
Mettre en valeur éthique et programme
« Nos sympathisants sont ravis de pouvoir voter dimanche pour des futurs élus qui leur ressemblent et qui pourront porter leurs ambitions et leurs aspirations », exprime Nizarr Bourchada, satisfait de la campagne électorale. Même le traitement de la presse lui a semblé globalement positif. « On a répondu à l’ensemble des sollicitations, mis à part Valeurs actuelles. Nous avons pu mettre en valeur notre éthique et notre programme », affirme-t-il. Le conseiller à la mairie de Brie-Comte-Robert est optimiste pour la suite : « Je pense qu’on va réveiller les consciences et s’émanciper politiquement (…) avec le résultat des législatives. On va pouvoir développer une communication et structurer les adhésions. » Son parti annonce vouloir s’étendre ensuite dans les régions lyonnaise et strasbourgeoise à l’orée des prochaines échéances électorales.
Cibles des attaques racistes
« Islamiser les débats pour ne pas avoir à s’occuper des vrais débats », c’est le problème qu’entend pointer l’UDMF. C’est parce que « le musulman est devenu un enjeu et un argument électoral » que le mot « musulman » placé au cœur du sigle est important, pour l’heure, selon Najib Azergui. Il a « vocation à interpeller la nation » face à la stigmatisation des musulmans. « Tant que notre nom suscitera la controverse, c’est qu’il y a un problème », estime Najib Azergui, qui déplore combien « la laïcité, outil de liberté, est devenu un bouclier contre l’islam » et « l’islamophobie, une forme de racisme acceptable ».
Le qualificatif « musulman » est absent du nom même du parti, mais des points de similitude avec les listes précédemment citées sont bel et bien présents, à la principale différence que les aspirants députés sont majoritairement issus de la communauté turque. Son fondateur Fatih Karakaya indiquait à Saphirnews en 2015 que le PEJ avait pour objectif de « défendre les banlieues, les plus démunis (et) les valeurs des musulmans ».
Avec le PEJ, l’ingérence de la Turquie dans les législatives ?
« Il s’agit sans aucun doute de la part du président Erdogan et de son parti l’AKP de peser sur les orientations de notre politique internationale, en particulier vis-à-vis du régime turc qui verse à pas accélérés dans la dictature. La même stratégie a été utilisée aux Pays-Bas ; il faut y mettre un terme », a signifié le secrétaire général du PCF Pierre Laurent dans une lettre adressée en mai au ministère de l’Intérieur. S’est notamment ensuivi un article assassin paru sur Marianne dans lequel le PEJ est décrit comme la « main d’Erdogan dans les urnes de France » et une « drôle d’officine (qui) investit barbus et voilées ».
Pérenniser son existence, tel est l’objectif déclaré des trois partis. Les électeurs donneront leur verdict les 11 et 18 juin.