Ramadan 2020 face au Covid-19 : ce qu’il faut savoir sur le mois du jeûne en 12 questions
Le mois du Ramadan, constitutif des cinq piliers de l’islam, fait son grand retour, cette année dans des circonstances exceptionnelles liées à la pandémie du Covid-19. Que savoir de ce mois béni, de ses dates, de ses obligations et de ses interdits ? Qu’est-ce que la crise sanitaire implique pour les musulmans ? Nos réponses en 12 questions pour connaître l’essentiel.
1/ Qu’est-ce-que le Ramadan ?
Le Ramadan, neuvième mois du calendrier hégirien (musulman), est un mois béni – et non sacré – durant lequel le Coran a été révélé au Prophète Muhammad par l’archange Gabriel. Le jeûne de ce mois est ordonné aux musulmans en ces termes dans le livre sacré : « Ô vous qui croyez ! Le jeûne vous est prescrit comme il a été prescrit à ceux qui vous ont précédés. Peut-être serez-vous pieux ? » (Sourate 2, verset 183).
Le jeûne vient remémorer aux musulmans cette révélation mais aussi purifier son corps et son âme. Le Ramadan est une également occasion de se rapprocher de Dieu et de se soucier du sort des plus démunis.
2/ Pourquoi les dates du Ramadan changent-ils d’une année sur l’autre ?
Le calendrier islamique est un calendrier lunaire, fondé sur les rotations de la Lune autour de la Terre. Le calendrier chrétien (ou grégorien) est fondé sur la révolution de la Terre autour du Soleil. Ainsi, l’année chrétienne compte 365 jours et un quart de jour tandis que l’année musulmane compte 12 mois, dont chacun varie entre 29 et 30 jours.
De ce fait, chaque année, le mois de Ramadan commence 11 jours plus tôt que l’année précédente, par rapport au calendrier chrétien qui est d’usage en France.
3/ Comment sont déterminées les dates du jeûne ?
Suivant le calendrier musulman, le mois du Ramadan est précédé du mois de Chaabane et est suivi du mois de Chawwal. Traditionnellement, le début du Ramadan est déterminé par l’apparition du croissant lunaire le 29e jour au soir de Chaabane.
Il est toutefois possible que des conditions météorologiques empêchent l’apparition du croissant lunaire. Dans ce cas, le Prophète recommande de compléter le mois de sorte à ce qu’il compte 30 jours : « Jeûnez dès que vous voyez le croissant et rompez le jeûne dès que vous le revoyez. Mais s’il se cache à vos regards, que Chaabane soit de 30 jours. » Le jour qui suit est considéré de facto le premier jour du Ramadan. Il en va de même pour la détermination du dernier jour du jeûne et en conséquence de l’Aïd al-Fitr.
4/ Comment les dates peuvent-elles être connues à l’avance ?
Les connaissances en astronomie ont considérablement évolué depuis l’avènement de l’islam. Les astronomes sont aujourd’hui à même de calculer, à la seconde près, le moment, la durée de l’apparition de la Lune dans le ciel de chaque pays tout au long de l’année. Des calculs sont effectués et ces données sont enregistrées à l’avance et mis à la disposition du public. Il est donc scientifiquement possible de savoir le début de chaque mois lunaire quel que soit l’état du ciel pour les prochaines années.
5/ A quelles dates débute et finit le mois du Ramadan cette année ?
Le calendrier musulman unifié fondé sur les calculs annonce un mois de jeûne étalé sur 30 jours avec un début du mois de Ramadan 1441/2020 fixé au vendredi 24 avril et une fin fixée au samedi 23 mai. En conséquence, la fête de l’Aïd al-Fitr, correspondant au premier jour du Chawwal, est prévue pour le dimanche 24 mai.
Pour ceux qui ne sont pas adeptes de la méthode scientifique permettant de déterminer les dates du Ramadan à l’avance, c’est l’annonce faite par le Conseil français du culte musulman (CFCM) lors de ses traditionnelles Nuits du doute à la Grande Mosquée de Paris qui est attendue.
6/ Qui peut être exempté de jeûne ?
L’observance du mois du Ramadan est obligatoire pour toute personne, hommes et femmes pubères en pleine possession de leurs moyens physiques. Ce jeûne n’est ainsi pas obligatoire pour les enfants de même que pour les personnes en mauvaise santé et souffrantes de maladies chroniques. Il leur est même recommandé de ne pas jeûner, la préservation de la santé étant une obligation en islam.
En ce sens, le Ramadan n’est pas non plus obligatoire pour les femmes enceintes et celles qui allaitent. Celles qui ont les menstrues et les lochies (les saignements après l’accouchement) en sont aussi dispensées. Les voyageurs peuvent aussi s’autoriser à ne pas jeûner.
Toutefois, les jours non effectués doivent être rattrapés, idéalement dans l’année. Pour ceux et celles qui sont dans l’incapacité de le faire, il conviendra de nourrir un pauvre par jour non jeûné ou de donner l’équivalent en argent.
7/ La dispense peut-elle s’appliquer aux personnes contaminées par le Covid-19 ?
La crise sanitaire liée au nouveau coronavirus n’implique pas en soi la possibilité pour les musulmans de reporter le jeûne du mois du Ramadan, insistent les autorités religieuses musulmanes.
Quid des personnes atteintes du Covid-19 ? Sur la base du principe édicté plus haut, la dispense s’applique à toute personne qui n’a pas les capacités physiques de jeûner ou pour qui le jeûne peut avoir des conséquences néfastes sur la santé. Le Covid-19 étant une maladie qui renferme encore bien des mystères, aller consulter un médecin est primordial ; c’est lui qui saura le mieux conseiller ses patients.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime, pour sa part, que les personnes contaminées par le nouveau coronavirus « devraient envisager de ne pas le faire, suivant les dérogations prévues par la religion, en concertation avec leur médecin, comme pour toute autre maladie ».
8/ Quelles sont les principales obligations et interdits du Ramadan ?
Chaque musulman est appelé à ne pas boire ni manger de l’aube (et non du lever du soleil) jusqu’au coucher du soleil. Il ne lui est pas non plus permis de fumer et d’avoir des relations sexuelles durant ce laps de temps. Comme le reste de l’année, il doit adopter un bon comportement et multiplier les bonnes actions.
Pour parachever le mois du Ramadan, il lui faudra s’acquitter de la zakat al-fitr, une aumône due par le chef de famille pour chaque personne qui compose son foyer, dès lors qu’il en a les moyens.
9/ Quelles sont les nouvelles obligations liées à la crise sanitaire à respecter ?
Le gouvernement français a décrété un confinement strict à la population, impliquant, entre autres mesures, une forte limitation aux déplacements ainsi que l’interdiction des rassemblements religieux et de réunions familiales jusqu’à nouvel ordre. La réouverture des lieux de culte n’est d’ailleurs envisagée par l’exécutif que bien après le mois du Ramadan.
De ce fait, et tout comme la prière du vendredi, les prières nocturnes du tarawih, spécifiques au mois du Ramadan, ainsi que la prière de l’Aïd al-Fitr sont impossibles à organiser dans les mosquées. Les musulmans sont appelés, par l’ensemble des organisations musulmanes, à prier chez eux et à rompre le jeûne uniquement avec les membres de leur foyer.
Des rites et des habitudes sont bouleversés mais le confinement n’empêche les fidèles de vivre avec sérénité, voire même avec intensité, le mois du jeûne. Sermons, récitations du Coran, rappels… Des mosquées et des associations mettent en place un service en ligne afin de maintenir le lien avec leurs fidèles durant la période de confinement.
10/ Qu’est-ce-que la nuit du Destin ?
La nuit du Destin (ou Laylat-Al-Qadr) est, selon la tradition musulmane, la nuit du décret Divin : c’est au cours de cette nuit que Dieu décrétera tout ce qui arrivera l’année suivante.
Cette nuit, durant laquelle le Coran a été révélé, survient au cours d’une des nuits impaires des dix derniers jours du mois de Ramadan, à savoir la nuit dont le lendemain correspond au 21, 23, 25, 27 ou 29 du Ramadan. Des savants musulmans affirment que la nuit du Destin se situe plus précisément la nuit du 26 au 27e jour du mois du Ramadan.
11/ A combien s’élève la zakat al-fitr ?
La zakat al-fitr est fixée par les organisations musulmanes en France à 7 € par personne depuis 2018, une aumône due par le chef de famille pour chaque personne qui compose son foyer, dès lors qu’il en a les moyens.
En parallèle de la zakat al-fitr, les personnes n’ayant pu effectuer le jeûne pour des raisons considérées comme valables en islam et qui ne peuvent rattraper les jours par la suite sont appelés à payer la fidya, un don compensatoire (nourrir un pauvre ou l’équivalent en argent par jour manqué).
Les personnes ayant choisi de ne pas jeûner ou de rompre délibérément leur jeûne devront, en plus de rattraper les jours de jeûne ratés, s’acquitter de la kaffara, un don expiatoire (nourrir 60 pauvres ou l’équivalent en argent par jour manqué). A défaut, elles devront jeûner durant deux mois consécutifs.
12/ Quand et à qui faut-il verser la zakat al-fitr ?
L’aumône du Ramadan doit être versée avant la prière de l’Aïd al-Fitr. Elle peut être payée dès le premier jour du mois afin de faciliter son acheminement et sa redistribution. La zakat al-fitr est destinée par ordre de priorité aux pauvres à proximité, puis aux plus éloignés. Pour cela, elle peut être confiée à une mosquée qui se charge ensuite de la redistribuer ou être versée à une association humanitaire de son choix.
Le confinement ayant entraîné la fermeture des mosquées, plusieurs d’entre elles ont mis en place des solutions en ligne pour permettre la collecte de fonds. Les fidèles habitués à donner leur zakat al-fitr aux mosquées devront donc se renseigner auprès de leur lieu de culte ou bien rediriger leur aumône vers des ONG.