Syrie : Bachar Al-Assad chassé du pouvoir, la fin de 50 ans d’une répression sans pitié
Après des décennies L’offensive des groupes rebelles contre le régime syrien a été fulgurante. En moins de deux semaines, et contre toute attente, ils ont mis en déroute l’armée, poussant Bachar Al-Assad à fuir Damas, tombée aux mains de ses farouches opposants samedi 7 décembre. Après 25 ans de pouvoir, le dirigeant syrien a précipitamment quitté la Syrie. Selon des médias russes, il a trouvé refuge avec sa famille à Moscou, qui fut longtemps un fidèle allié du régime avec Téhéran.
Le soulagement est immense pour des millions de Syriens, qui ont souffert de la dictature imposée par la famille Al-Assad et le parti Baas durant un demi-siècle. Ces dernières années, après la révolution syrienne qui s’est transformée en guerre civile en 2011, une terrible répression s’est abattue sur la population qui aspirait à un changement de régime. Des centaines de milliers de personnes ont été tuées ou sont portées disparues, tandis que plusieurs millions ont fui leurs foyers. C’est tout naturellement qu’à l’annonce de la chute d’Al-Assad, les Syriens sont sortis par milliers pour manifester leur joie, aussi bien dans le pays qu’à travers le monde.
La fin du régime, une bonne nouvelle saluée par Paris
Plusieurs dirigeants de pays occidentaux ont salué, dimanche 8 décembre, la chute du régime, à l’instar d’Emmanuel Macron. « L’État de barbarie est tombé. Enfin », a fait savoir le président français, rendant « hommage au peuple syrien, à son courage, à sa patience. Dans ce moment d’incertitude, je forme pour lui des vœux de paix, de liberté et d’unité ». Et d’ajouter : « La France restera engagée pour la sécurité de tous au Moyen-Orient. »
« Après plus de 13 ans d’une répression d’une grande violence contre son propre peuple (…), Bachar al-Assad laisse un pays exsangue, vidé d’une grande partie de sa population qui, si elle n’a pas été soumise à l’exil, a été massacrée, torturée et bombardée aux armes chimiques par le régime et ses alliés », a souligné le Quai d’Orsay dans un communiqué. La France « appelle au silence des armes, à la préservation des institutions de l’Etat, au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie » et souhaite « une transition politique pacifique et respectueuse de la diversité du peuple syrien, qui protège les civils et toutes les minorités, conformément au droit international ».
Du côté des pays arabes dont plusieurs opéraient récemment un rapprochement diplomatique avec le régime, les Syriens sont appelés à ne pas sombrer « dans le chaos » par l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis ou encore le Qatar. « Le temps est venu pour le peuple syrien de jouir de la vie digne qu’il mérite », a indiqué le ministère saoudien des Affaires étrangères.
« Après 14 ans de guerre brutale et la chute du régime dictatorial, le peuple syrien peut aujourd’hui saisir une occasion historique de construire un avenir stable et pacifique », a salué le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, appelant « à éviter la violence en cette période sensible, tout en protégeant les droits de tous les Syriens, sans distinction ».
Des questions sur l’avenir politique qui se dessine pour la Syrie, des espoirs permis
Le soulagement, donc, est réel, légitime, mais des questions émergent quant à l’avenir politique qui se dessine pour la Syrie. La coalition de groupes rebelles qui ont chassé Bachar Al-Assad est menée par le groupe islamiste Hayat Tahrir al-Sham (HTS, anciennement appelé Front al-Nosra) dont le leader est Abou Mohammed al-Jolani. Ancien chef d’une branche d’Al-Qaïda, il a rompu avec l’organisation radicale pour se présenter aujourd’hui sous un jour modéré, explique RFI.
« Personne n’a le droit d’effacer un quelconque groupe. Les différentes communautés ont coexisté dans cette région durant des centaines d’années et personne n’a le droit de les éliminer. Il doit y avoir un cadre légal qui protège et qui assure les droits de chacun. Pas un système qui serve une seule communauté, comme ce qu’a fait le régime d’Assad », a notamment rassuré le quadragénaire lors de la prise d’Alep fin novembre.
Aucune exaction n’a vraisemblablement été commise lors de l’offensive éclair, rassurant une population encore traumatisée par le régime mais aussi par l’organisation État islamique, dit Daesh. Mohammed al-Jolani a par ailleurs appelé ses combattants à ne pas s’approcher des institutions publiques à Damas, encore sous contrôle de l’ex-Premier ministre Mohamed al-Jalali jusqu’à une « passation officielle ». Ce dernier s’est, pour sa part, dit prêt à coopérer avec tout nouveau « leadership » choisi par le peuple, précisant qu’il serait dimanche dans ses bureaux au siège du gouvernement pour toute procédure de « passation » de pouvoir.
De son côté, Amnesty International a appelé a ce que les auteurs des crimes perpétrés sous le pouvoir de Bachar al-Assad puissent être jugés lors de « procès équitables », en excluant la peine de mort. « L’étape la plus importante est celle de la justice, non de la vengeance », a indiqué l’ONG de défense des droits humains.
Même son de cloche pour Human Rights Watch, qui appelle les futurs dirigeants à « garantir une justice équitable et impartiale à l’avenir ». « La chute du gouvernement de Bachar al-Assad offre aux Syriens une opportunité sans précédent de tracer un nouvel avenir fondé sur la justice, la responsabilité et le respect des droits humains », a affirmé Lama Fakih, directeur de HRW au Moyen-Orient. « Quiconque prendra la direction du pays devra rompre complètement et résolument avec la répression et l’impunité du passé et établir un système qui respecte les droits humains et la dignité de tous les Syriens, quelles que soient leurs origines ou leurs opinions politiques. »d’une féroce dictature, le régime d’Al-Assad a soudainement pris fin dimanche 8 décembre après une offensive éclair des rebelles. Une période d’incertitude s’ouvre désormais mais de nouveaux espoirs sont permis pour des millions de Syriens en quête de justice et de liberté.