L’histoire du jeune du ramadan, et ses finalités
Les sagesses du jeûne sont innombrables. De par sa nature, le jeûne, qui ne laisse que très peu de signes extérieurs, se pratique dans la discrétion et offre l’occasion de tisser un lien intime entre le jeûneur et son Seigneur. Dieu nous dit à son propos : « le jeûne M’appartient et c’est Moi qui le rétribue ». Les anges, eux-mêmes, n’en connaissent pas la portée, ni la rétribution dont les secrets seront dévoilés le jour où l’on rendra des comptes. Félicitations aux jeûneurs dira-t-on !
Les jeûneurs seront invités à rejoindre une porte appelée Rayyan, passage singulier exclusivement accordé aux jeûneurs, et donnant accès au Paradis et ses délices. Le jour de la rétribution, les bienheureux recevront un accueil très particulier, un accueil divin.
Le jeûne est un des piliers du mois du Ramadan qui est le mois du Coran par excellence, qui fut descendu durant la nuit du destin au ciel le plus-bas pour ensuite être révélé sur vingt-trois années au bien-aimé prophète Mohammad – Paix et bénédictions sur lui. Le jeûne durant le mois du Ramadan constitue un terreau très fertile pour permettre à l’âme de s’élever spirituellement et moralement et nous inviter à rechercher la proximité de Dieu :
« Et quand Mes serviteurs t’interrogent sur Moi…alors Je suis tout proche: Je réponds à l’appel de celui qui Me prie quand il Me prie. Qu’ils répondent à Mon appel, et qu’ils croient en Moi, afin qu’ils soient bien guidés » (La vache – V 186).
Quelles sont les origines de cette pratique et ses finalités ?
Nous savons que le jeûne est une pratique reconnue dans de nombreuses traditions spirituelles, pour favoriser la méditation et la quête spirituelle. Pour ce qui est de la place du jeûne dans les différentes traditions et civilisations, nous invitons à la lecture de l’excellent article du site sur l’histoire du jeûne[1].
L’institution du jeûne en islam fut décrétée à travers la Révélation du Coran de la sourate La Vache, verset 183 : « Ô croyants ! Le jeûne vous est prescrit comme il a été prescrit aux peuples qui vous ont précédés. – afin d’atteindre la Taqwa ». Le jeûne s’inscrit ici dans une tradition et une sagesse ancestrale et qui a pour finalité l’acquisition de la Taqwa, vocable arabe que le terme piété ne saurait traduire. Le monde intérieur de l’âme auquel s’adresse la Taqwa est tout un univers…
Le jeûne a pour finalité d’entreprendre un travail en profondeur sur soi. Il intéresse donc toute personne qui souhaite s’élever dans sa moralité et sa spiritualité et se libérer des pesanteurs du désir et des passions. Le jeûne est donc une action volontaire et non pas une marche forcée ou un supplice.
Dans la tradition musulmane, tout exercice spirituel, à l’exception du Dhikr (la souvenance de Dieu dont l’idéal est que sa pratique soit permanente) est encadré dans le temps de sorte à ne pas épuiser le corps et ne pas lasser l’âme. La diversification des activités spirituelles et des bonnes œuvres est, de manière générale, encouragée par la tradition prophétique qui vise un cheminement équilibré et harmonieux. Il en est ainsi du jeûne qui place l’âme entre l’état de la patience et la persévérance au moment du jeûne et l’état de la gratitude au moment de la rupture.
Le jeûne a plusieurs profondeurs comme nous l’indique l’Imam Abu Hamid Al Ghazali (illustre savant musulman du Xième siècle) dans son célèbre ouvrage Revivification des sciences de l’islam (Ihya Ulum al-Din) :
Le jeûne comporte trois degrés : le jeûne des gens du commun, le jeûne des gens de l’élite et le jeûne de l’élite de l’élite.
Pour ce qui est du jeûne des gens du commun, il consiste à s’abstenir de manger de boire et d’avoir des rapports charnels.
Quant au jeûne des gens de l’élite, il consiste à empêcher le regard, la langue, la main, le pied, l’ouïe, la vue et l’ensemble des membres de commettre des péchés.
S’agissant du jeûne de l’élite de l’élite, il s’agit du jeûne du cœur devant les basses ambitions et des idées qui éloignent de Dieu pour cesser totalement de s’intéresser à tout ce qui est autre que Dieu.
L’exercice du jeûne est donc une progression, un cheminement vers les voies de l’Ihsane que le prophète (paix et bénédictions sur lui) décrit en disant : « l’Ihsane c’est que tu adores Dieu comme si tu Le voyais, et si tu ne Le vois pas sache que Lui te voit ». Il s’agit d’une voie qui fait naître de nouveaux sens. La vue dont il est question ici est une faculté du cœur à percevoir la réalité et qui a su faire tomber les voiles des passions et des basses ambitions.
Le jeûne vient accompagner tout un programme que recommande la période fertile et bénie du mois de Ramadan pour le croyant et la croyante, à savoir : la prière, la lecture du Coran, la recherche du savoir, le don, l’entraide et la solidarité. Toutes ces belles actions ne sauraient être entachées ou gâchées par un mauvais comportement. Tout perdrait alors son sens.
En cette période de confinement qui coïncide avec le mois du Ramadan, le jeûne et son éthique constituent une formidable occasion de retour à soi, de retisser des liens authentiques avec ses proches, de penser et d’agir en faveur des personnes vulnérables, de prendre goût à la sobriété… autant de semence à un monde plus résilient et plus humain qui tournerait la page à un système basé sur l’exploitation aveugle des ressources de la Terre et le gaspillage !
La finalité du jeûne est donc la piété et le noble caractère : les deux sont indissociables, l’un étant l’expression de l’autre. Le prophète bien-aimé (paix et bénédiction sur lui) nous dit : « Pour celui qui ne renonce pas au mensonge dans les actes et les paroles, Dieu n’a nul besoin qu’il renonce à sa nourriture et à sa boisson ».
[1] https://www.psm-enligne.org/sante/2349-histoire-du-jeune-12