Terre sainte : miroir d’un système-monde aux abois

Un contexte enraciné dans l’histoire

A l’heure où je rédige ces quelques lignes, l’enclave de Gaza est pilonnée par l’armée israélienne, qui prend pour cible sans distinction civils, femmes, enfants, personnes âgées, blessés, hôpitaux, écoles, campements. Elle adopte une stratégie de l’anéantissement, de la négation de l’autre.

Ce qui se passe aujourd’hui à Gaza s’inscrit dans l’histoire, dans la continuité d’une volonté, d’une stratégie, qui a pour but, non pas d’éradiquer le Hamas, mais de procéder au nettoyage ethnique de la bande de Gaza. Les bombardements incessants qui obligent la population à fuir, à se déplacer, en sont la preuve. Quelle est l’origine de tout cela ? Une occupation territoriale progressive, une volonté de domination, de suprématie, d’écrasement et d’extinction de l’autre. L’« autorité palestinienne » et le peuple palestinien[1] ne sont pas souverains au sein de leur propre territoire, ou du moins de ce qu’il en reste. Dans le cas de figure de l’entité palestinienne, on ne peut parler aujourd’hui ni d’Etat ni de nation, rappelons-le, même si cela paraît être une évidence. La marge de manœuvre de cette « autorité » a, en réalité, toujours été quasiment inexistante, car conditionnée par le bon vouloir de l’Etat d’Israël. « Son » territoire, grignoté au fil des décennies par la politique de colonisation que mène Israël, au mépris du droit international, réduit encore et encore l’espace vital des Palestiniens, qui s’agglutinent dans la promiscuité, de territoires toujours plus réduits dans lesquels ils peinent à respirer aujourd’hui. Ils vivent tassés dans une prison à ciel ouvert, qui reste une prison au sens propre du terme. Aujourd’hui, on leur refuse le droit même de résister face à l’occupant. La détresse dans laquelle vivent les Palestiniens est indescriptible : système de santé qui s’effondre, manque de moyens pour soigner les malades, les blessés, de médicaments, d’eau, de nourriture, de produits de première nécessité, etc. Le blocus territorial a des conséquences humaines désastreuses : morts, blessés, famine, maladies, etc. On cherche à faire plier la population par la peur, la terreur. Inexorablement, l’histoire se répète. Voici ce que pense Edgar Morin de ce qui se passe à Gaza : « Je suis à la fois ahuri et indigné par le fait que ceux qui représentent les descendants d’un peuple qui a été persécuté pendant des siècles pour des raisons religieuses ou raciales, que les descendants de ce peuple qui sont aujourd’hui les décideurs de l’Etat d’Israël, que ceux-là puissent non seulement coloniser tout un peuple, le chasser en partie de sa terre et vouloir l’en chasser pour de bon  ».

Des générations de Palestiniens ont grandi dans cette prison avec tout ce que cela implique comme privations et comme restrictions. Mais l’adversité ne forge-t-elle pas la conscience de soi, de sa raison d’être sur Terre, le caractère et la volonté des individus ? Avec des taux d’alphabétisation et de scolarisation qui avoisinent les 100%, le système éducatif palestinien est un des plus performants de la Méditerranée orientale. Cette région a subi différentes influences et dominations, chrétienne et musulmane notamment. Elle se trouve au carrefour de civilisations, de religions et d’influences culturelles diverses. Elle représente le berceau des trois monothéismes. Cette situation particulière a historiquement engendré convoitises et conflits. Les Croisades sont là pour nous rappeler ô combien la sacralité du lieu a été source au fil des siècles de tensions et de revendications. Les Croisades entreprises du XIème au XIIIème siècle par les chrétiens d’Occident, à l’instigation de la papauté, avaient pour but de libérer les lieux saints alors sous domination musulmane. A l’époque contemporaine, «  on peut s’interroger si le démembrement de l’Empire ottoman qui répondait à l’objectif séculaire des Puissances européennes a contribué à apporter la dignité et le bonheur aux peuples libérés du « joug ottoman » au début du 2Oème siècle. Les Etats successeurs dans les Balkans ou au Proche-Orient ont connu et certains d’entre eux connaissent encore des tragédies de guerres et d’occupations, accompagnées de misères morales, économiques et sociales qu’aucun des protagonistes de l’ordre imposé entre 1918 et 1923 n’aurait pu imaginer  »[2]. Cette région connaît au fil des siècles une alternance entre périodes de paix et périodes de guerres.

Comme le rappelle Alban Dignat[3], l’idée d’un retour physique en terre d’Israël (Eretz Israël) apparaît au XIXème siècle, au lendemain de la Révolution française, dans un contexte de montée des nationalismes et de laïcisation des esprits. Une première colonie de Juifs russes s’installe dans la région en 1882. En 1896, Theodor Herzl publie L’État Juif, dans lequel il promeut la création d’un État juif autonome. Le journaliste publie son ouvrage dans le climat d’antisémitisme que connait la France depuis la condamnation du capitaine Dreyfus (1894). Il réunit à Bâle en 1897 le premier Congrès sioniste. Si Theodor Herzl apparait comme l’une des figures emblématiques du sionisme, l’instrument qui mettra en œuvre cette idée et lui donnera corps, d’autres penseurs avant lui sont les « précurseurs du sionisme ». Alors que planait la menace d’un conflit mondial, les Ottomans cherchèrent la protection des grandes puissances. Rejetés par le Royaume-Uni, la France et la Russie, ils conclurent une alliance avec l’Allemagne. La partition fut planifiée par les puissances occidentales dans plusieurs accords conclus par les « Alliés » dès le début de la Première Guerre mondiale[4]. En 1916, les Français et les Anglais de se partagent secrètement les dépouilles de l’empire ottoman au crépuscule de sa vie. En 1917, avec la « Déclaration Balfour » (ministre britannique des Affaires étrangères), le Royaume-Uni prévoit la création d’un « foyer national juif » en Palestine. A l’issue de la première guerre mondiale, les Britanniques, sur les ruines de l’empire ottoman, occupent la Palestine. La Ligue des Nations (ancêtre de l’ONU), accorde au Royaume-Uni en 1922 un mandat sur la région. En 1948, l’État d’Israël est finalement proclamé. Cela provoque de vives réactions chez les arabes. Cette idée, qui bafoue purement et simplement les droits des Palestiniens, trouve sa légitimité dans un attachement historique du peuple juif à cette région.

Henri Lefebvre estime que la réalité palestinienne offre la démonstration par la négative que l’espace est le pouvoir[5]. « Moins il y a d’espace, plus le pouvoir des Palestiniens est entravé. Mais par-delà l’assise spatiale qui fonde l’exercice du pouvoir, Henri Lefebvre avait surtout montré combien l’espace est avant tout une production politique. Or, dans le cas présent, l’analyse des étapes du conflit israélo-arabe révèle une ingénierie territoriale israélienne qui a su utiliser des opportunités, quand elle ne les a pas provoquées, pour amputer progressivement l’espace palestinien au profit de l’espace israélien et de ladite sécurité de l’Etat « hébreu »[6]. Les tensions dans cette région sont notamment liées au fait qu’elle revête une dimension à la fois hautement géostratégique et profondément sacrée. L’instabilité dans cette zone a un impact sur la paix dans le monde tout entier, en entraînant celui-ci dans une crise sans fin. La situation dans cette partie du globe représente en quelque sorte un baromètre de l’état de notre monde et de sa stabilité.

Puissances hégémoniques, idéologies de la destruction

Au nom de convictions idéologiques, de considérations économiques, de calculs géostratégiques, on légitime l’inacceptable, l’horreur, un état de violence qui devient norme. Ce qui se passe aujourd’hui à Gaza est révélateur de l’état de notre monde et de notre humanité.

Le sionisme est né à la fin du XIXème siècle. Ce mouvement politique apparait en Europe de l’Est. Il a pour finalité de permettre un retour des juifs en Palestine, condition préalable à la concrétisation de la promesse divine et à la venue du vrai Messie. Il est en ce sens un projet à la fois politique et territorial. La Palestine est alors sous domination ottomane et majoritairement musulmane.

Toute philosophie de domination, qui institue et enracine la haine, institue une économie de la destruction, de l’asservissement de l’homme par la matière, n’engendre rien de bon. Elle s’inscrit dans la continuité des idéologies matérialistes et hégémoniques de notre ère qui ont légitimé le colonialisme en tant que stratégie « civilisatrice ». Ce qui se passe aujourd’hui est révélateur d’une pensée qui ne partage pas, à l’image des puissances coloniales qui aspirent à un asservissement territorial sans partage aucun. On assiste aujourd’hui comme hier, à la loi du plus fort. Qu’elles soient ethniques, religieuses ou territoriales, les motivations de l’oppresseur (colonisation, génocide, nettoyage ethnique), ont toujours des conséquences destructrices d’un point de vue humain. Les discours qui prônent sournoisement la paix tout en la combattant avec acharnement, ajoutent à la souffrance des populations opprimées, à leur frustration et à leur impuissance face à l’injustice. La paix n’est en réalité jamais inscrite dans l’agenda des idéologies qui prônent l’anéantissement de l’autre, à qui on ne reconnait pas la qualité de simple humain, digne d’être considéré et respecté comme tel.

Au nom d’une lutte sans merci contre le terrorisme, des pays comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la France, L’Europe – qui se prétend défenseur des droits de l’Homme – renient leurs valeurs, apportent un soutien inconditionnel à la politique d’un Etat qui se rend coupable des pires crimes. Nous assistons à un nettoyage ethnique qui s’inscrit dans un agenda de l’horreur et de la terreur. Le silence assourdissant de la communauté internationale ne laisse personne indifférent. Le monde se rend en réalité complice de ce massacre qui a lieu sous nos yeux, qui ne savent plus ou ne veulent plus s’émouvoir face à une violence banalisée. On ne compte plus les morts à Gaza et en Palestine : les exactions et les charniers se multiplient. A quel code de valeurs pourrait bien obéir une armée qui cible combattants et civils sans distinction, qui rase des hôpitaux bondés de malades et de blessés, qui institutionnalise la torture, et qui se targue de mener une croisade au nom des libertés et du bien ? Gaza est depuis des années synonyme de prison à ciel ouvert. Les bombardements incessants et aveugles en ont fait une ville-décombres, une ville-cimetière. Depuis longtemps, les Palestiniens vivent sous perfusion, dépendants du bon vouloir de l’Etat hébreu et des aides humanitaires provenant de l’extérieur et acheminées au compte-goutte.

Qui peut encore aujourd’hui se placer en toute impunité au-dessus de la loi, du droit international, de balayer d’un revers de main les accusations de génocide proférées notamment par des Etats souverains tels l’Afrique du Sud ? De plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer une violation du droit international et de toutes les conventions censées garantir la paix dans le monde. Ces exactions répétées années après années s’inscrivent dans le sillon interminable des crimes contre l’humanité perpétrés à notre époque dans les quatre coins du monde : dans les ex-colonies (notamment en Afrique et en Asie), au Rwanda, au Vietnam, au Cambodge, en Birmanie, en Chine où le peuple ouïghour subit au quotidien toutes sortes d’atrocités et d’humiliations.

Les considérations historiques, ethniques, religieuses, territoriales, économiques, géostratégiques et politiques, en toile de fond, qui s’enchevêtrent et s’imbriquent ici, expliquent la violence et servent à la légitimer. Force est de constater que, dans l’histoire, d’un point de vue politique, culturel et économique, les idéologies à visées impérialistes, de domination, n’ont rien engendré de bon. Elles ont pour ambition de dominer sans partage, de soumettre l’autre, par tous les moyens. Elles convergent dans le sens où elles obéissent à une même logique égoïste : servir les intérêts d’une minorité.

Rien ne justifie la violence. Plus généralement, l’injustice, quelle que soit la forme sous laquelle elle se manifeste, s’enracine dans une idéologie du mal, qui annihile toutes valeurs qui sacralisent la dignité humaine. Pour Yakov M. Rabkin, « l’association automatique des juifs à l’État d’Israël est fondamentale pour les sionistes qui, depuis les origines de ce mouvement politique il y a plus d’un siècle, se présentent comme les représentants d’un peuple juif tout entier. En se proclamant « l’avant-garde du peuple juif dans son ensemble », en parlant « au nom du peuple juif » les sionistes renforcent l’association automatique des juifs avec l’État Israël. Cela ne fait qu’encourager l’antisémitisme dans le monde en tribalisant le conflit et en l’exportant hors des frontières d’Israël. Or il est grave que les juifs – minorité avant tout religieuse que la tradition oblige à la pudeur, la miséricorde et la bienfaisance – soient de plus en plus associés aux images de soldats et de colons armés qui remplissent les écrans de télévision du monde entier »[7].

Pierre Stambul rappelle que dans l’interprétation des Evangéliques, « Dieu a fait don de la terre d’Israël et de Jérusalem au peuple juif. Les chrétiens sionistes veulent « restaurer  » les Juifs en Terre sainte et les convertir. Cette conversion est considérée comme un préalable au retour du Christ et à l’avènement de la fin des temps. Ces chrétiens sionistes n’aiment pas les Juifs réels, au contraire. Pour eux, les Juifs qui ne se convertiraient pas doivent disparaître »[8]. S’il existe des juifs qui se réclament de cette idéologie, il existe aussi des chrétiens sionistes, très influents aux Etats-Unis, qui vont d’ailleurs jouer un rôle important dans l’avènement et le développement de celle-ci. En 2019, 125 d’universitaires juifs ont signé en France un appel, suite à la présentation d’un texte à l’assemblée nationale qui assimile l’antisionisme à l’antisémitisme. Cet appel rappelle que « pour les Palestiniens, le sionisme représente la dépossession, le déplacement, l’occupation et les inégalités structurelles. Il est cynique de les stigmatiser comme antisémites parce qu’ils s’opposent au sionisme. Ils s’opposent au sionisme non par haine des Juifs, mais parce qu’ils vivent le sionisme comme un mouvement politique oppressif. Agir ainsi témoigne d’une grande insensibilité et d’une politique de deux poids, deux mesures, sachant qu’Israël nie le droit de la Palestine à exister et mine son existence même.
Il n’y a aucun doute qu’il existe des antisémites parmi les gens qui s’opposent au sionisme. Mais il y a également beaucoup d’antisémites qui soutiennent le sionisme. Il est donc inapproprié et totalement inexact d’identifier de manière générale antisémitisme et antisionisme
 ». Pour Pierre Stambul, « l’État d’Israël et ceux qui le soutiennent inconditionnellement prétendent définir ce qu’est l’antisémitisme et décréter qui est antisémite. Ils s’emparent de la mémoire de l’antisémitisme et du génocide nazi. Ils n’ont aucun droit sur cette mémoire, d’autant moins que l’Histoire nous montre qu’antisémitisme et sionisme ne sont pas incompatibles »[9]. Gideon Levy, journaliste anticolonialiste israélien, a écrit dans le journal Haaretz, le 20 novembre 2016, un article intitulé « Nos amis antisémites  »  : «  Tout à coup, il n’est plus si horrible d’être antisémite. Soudain, il est devenu excusable de haïr les musulmans et les Arabes à condition d’« aimer Israël  ». Les droites juive et israélienne ont décrété une large amnistie aux amants antisémites d’Israël. Et ce sont ces derniers qui vont bientôt exercer le pouvoir à Washington  ».

Penser un monde et une société de valeurs

L’homme moderne, est assailli en permanence par un flux d’images d’informations, qu’il peine à analyser. Il lui est désormais difficile de porter un regard critique sur la réalité et le monde qui l’entoure. Il n’a plus le temps aujourd’hui de s’émouvoir, de faire preuve d’empathie, de tout simplement écouter l’autre, pris dans le tourbillon des considérations terre à terre, purement matérielles. Il subit une réalité qui Les valeurs immuables qui incarnaient nos sociétés autrefois, nos relations au quotidien, se désagrègent au fur et à mesure que progressent sur le terrain les idéologies individualistes, sans âme, qui prônent la haine et le rejet de l’autre. Comment donc replacer l’humain au cœur de l’édifice social, les liens intergénérationnels, le respect de nos aînés, l’éducation, la prise en compte des populations les plus vulnérables, seule voie garantissant une paix stable et durable au sein des sociétés ?

Le modèle matérialiste, qui divinise l’avoir, « valeur » qui a fini par supplanter celle de l’être, abîme l’humain, ce qu’il y a de profondément humain en nous, réduit cette part de vertus humaines, telles la générosité ou l’empathie qui sont innées chez l’homme. Il abîme les relations interpersonnelles, la convivialité, le fait de prendre le temps d’écouter l’autre, de le comprendre, d’approfondir les choses. Il a conduit notre monde au bord du précipice. Ce modèle, contre-nature, présenté comme le summum de la civilisation, vit certainement ses dernières heures. La crise complexe que nous connaissons, qui semble inextricable, trouve son origine dans un système qui a refusé à l’homme le droit de donner un sens à sa vie. L’Occident a quelque part renié ses valeurs profondes, toutes fondées avant tout sur la sacralité de la dignité humaine. L’instantanéité, l’immédiateté, rythment nos vies désormais, nous courons après le temps, nous n’avons plus le temps d’apprécier simplement l’instant présent, les choses simples de la vie. Nous ne sommes plus réellement maîtres de notre propre existence. Comment sortir de ce paradigme destructeur d’une modernité dont la marche est dictée par des impératifs qui riment avec « matière », « avoir », « consommation » et « croissance » ? La France soutient politiquement et financièrement l’occupation territoriale que mène l’Etat israélien, processus qui en est à sa phase ultime, alors que le monde agricole se meurt sous ns yeux. L’Etat de notre agriculture est révélateur d’un système en crise, en faillite, d’une économie sans fondement et sans racines. Ce système qui asservit l’homme à la matière, prône une gouvernance par la peur : peur de la précarité, de perdre son statut, son emploi, son logement, de ne pas pouvoir boucler ses fins de mois. Les classes, les catégories sont mises en compétition. On a institutionnalisé au fil du temps la compétition dans toutes les sphères de la société : monde l’éducation, du travail, de l’art, etc. Ceci pousse à un état de tension permanent, à la division, à de la défiance.

Quel monde voulons-nous léguer aux générations futures ? Un monde fondé sur des valeurs universelles, qui composent historiquement l’ADN d’un pays comme la France, telles le droit de chacun de vivre en paix et en sécurité, quelles que soient, ses convictions, ses origines ou ses appartenances, la sacralité de la vie ou bien le respect inconditionnel de la dignité humaine ? Ou au contraire, un monde fondé sur le mépris de celle-ci, dicté par la loi du plus fort, une loi qui opprime et qui va jusqu’à annihiler le droit d’exister de ses semblables ? Les idéologies totalitaires du siècle dernier sont là pour nous rappeler cette réalité. Les rapports de force existent et existeront toujours, ils contribuent à l’équilibre des sociétés et permettent aux différentes sociétés qui cohabitent dans notre monde de trouver un équilibre entre elles. Lorsqu’il y a domination sans partage, écrasement de l’autre, asservissement, là nait la souffrance, le déséquilibre, le sentiment d’injustice, l’humiliation et la rancœur.

Il n’y a pire humiliation et violence que celle qui naît de la soumission de l’autre par la force et par le mépris. Toutes les puissances, qui ont régné sans partage, de l’antiquité à la période coloniale, en passant par celles qui ont marqué le Moyen-Age, qui se sont imposées par la force, ont perpétué au fil du temps une tradition qui a institué la violence et a semé la haine ici et là. Il suffit de regarder ce qu’ont engendré les totalitarismes du vingtième siècle comme guerres et massacres pour comprendre jusqu’où peut aller l’atrocité. Au nom d’un devoir « civilisationnel », les pires crimes ont été perpétrés. Toute idéologie qui s’inscrit dans cette tradition de domination, dans ce cortège des puissances injustes qui ont contribué à mener le monde à sa perte, est condamnable au plus haut point. Quelle idéologie peut-elle mener à un tel mépris, à une telle négation, de l’humain, de la vie, en tant qu’être éminemment sacré ?

Les démocraties occidentales, L’Europe, la France, ont-elles renié ce qu’il y a de bon et de meilleur en elles, leur vocation à porter des valeurs universelles immuables, incarnées au fil des siècles par des hommes et des femmes de conviction ? Ces modèles vivants sont là pour nous rappeler la teneur de ces valeurs, leur ADN profond, et que celles-ci ont bien été incarnées par le passé et ne cesseront de l’être par toutes les bonnes volontés. La seule voie de salut pour l’Occident est de s‘exorciser de ses vieux démons tels l’ethnocentrisme ou le devoir de civilisation, et de renouer avec son héritage de valeurs humaines, spirituelles, morales et culturelles. Les choses s’accélèrent indéniablement aujourd’hui, deux visions dichotomiques du monde s’affrontent, qui laissent entrevoir des scénarios opposés, et chacun est amené à choisir son camp.

Source : Agoravox

Références

Pierre Blanc, « Palestine : géopolitique d’une violence territoriale », Confluences Méditerranée, 2013/3 (N° 86).

Paul C. Helmreich, From Paris to Sèvres : The Partition of the Ottoman Empire at the Peace Conference of 1919-1920, Ohio University Press, 1974.

Henri Lefebvre, Espace et politique, Paris, Anthropos, 1968, et Henri Lefebvre, La production de l’espace, Paris Anthropos, 2000.

Yakov M. Rabkin, « L’opposition juive au sionisme », Revue internationale et stratégique, 2004/4 (N°56).

[1] Selon Léo Durin, « le terme de « Palestine » est attesté depuis le Ve siècle avant J.-C. dans les écrits de l’historien grec Hérodote. L’empereur Hadrien, désireux de punir les Juifs pour s’être révoltés entre 132 et 135, en a même fait le nom officiel de la région au IIe siècle, délaissant l’appellation préalable de Judée. Depuis l’époque romaine, le territoire est passé entre de nombreuses les mains, des Arabes aux Britanniques en passant par les Croisés et les Ottomans, avant que l’État d’Israël ne soit fondé en 1948 ».

[2] Antoine Fleury, « Le démembrement de l’Empire ottoman », Hypothèses, 2015.

[3] https://www.herodote.net/Les_origines_du_sionisme-synthese-323.php

[4] Paul C. Helmreich, From Paris to Sèvres : The Partition of the Ottoman Empire at the Peace Conference of 1919-1920, Ohio University Press, 1974.

[5] Henri Lefebvre, Espace et politique, Paris, Anthropos, 1968, et Henri Lefebvre, La production de l’espace, Paris Anthropos, 2000.

[6] Pierre Blanc, « Palestine : géopolitique d’une violence territoriale », Confluences Méditerranée, 2013/3 (N° 86).

[7] Yakov M. Rabkin, « L’opposition juive au sionisme », Revue internationale et stratégique, 2004/4 (N°56).

[8] https://www.contretemps.eu/sionisme-antisemitisme-fascisme-extreme-droite-israel/

[9] Ibid.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Bouton retour en haut de la page