Sur les pas de Hajar
Les rituels du pèlerinage s’expriment à travers une multitude d’images et de symboles. Chaque acte de dévotion porte en lui une signification spécifique, revêtant des nuances et des teintes précises dans le monde visible, tout en offrant une essence particulière dans le monde invisible. Dans cette série intitulée « Le Pèlerinage : Symboles et Secrets », nous explorerons les symboles et les mystères du pèlerinage, en méditant sur ces aspects pour bénéficier pleinement des effluves de la Miséricorde divine. Préparez-vous pour un voyage fascinant à travers l’histoire du pèlerinage à La Mecque, de ses origines à nos jours !
Hajar, une foi exemplaire
Lorsque l’ordre divin fut donné à Abraham de partir, sa compagne Hajar le rassura. Elle l’encouragea à accomplir la tâche que Dieu avait prévu pour lui. Elle l’attendrait, avec l’intime conviction que le Tout-Puissant n’allait pas les abandonner.
Pourtant rationnellement, les conditions étaient tellement difficiles qu’elles auraient pu pousser n’importe quel autre être humain au désespoir. Elle était totalement seule avec un tout petit bébé, vulnérable, dans une terre désertique complètement inconnue. Et personne à l’horizon pour les aider…
Après le départ de son mari, les provisions en nourriture et en eau furent très vite épuisées. Par instinct de survie, Hajar posa alors Ismaël dans un endroit qu’elle jugea sécurisant et se mit à courir de toutes ses forces pour trouver de l’aide. Elle se dirigea d’abord vers une colline (Safa), puis courut vers une autre colline (Marwa). Apeurée, elle fit ce même trajet 7 fois à la suite, en pleine canicule. Au bout de sa course effrénée et ne trouvant aucune solution, elle finit par revenir auprès de son bébé assoiffé.
Puis soudainement, le miracle de Dieu apparut… Avec l’intervention de l’ange Gabriel, de l’eau se mit à jaillir miraculeusement tout près de cet enfant.
Zamzam, une bénédiction
Le nom de Zamzam provient de la phrase Zomë Zomë, qui signifie « Stop ». Ce sont les mots de Hajar. Elle les aurait répétés pour tenter de contenir lʼeau de la source, déversée en abondance lorsquʼIsmaël nʼétait alors quʼun petit bébé. Zamzam est considérée comme la meilleure eau qui existe sur terre. Dʼaprès la tradition prophétique, elle « nourrit » le pèlerin, soulage lʼâme et le corps (1)
Le puits de Zamzam est situé à une vingtaine de mètres de la Kaaba. Un peu partout dans la Mosquée Sacrée, il y a de très nombreuses petites fontaines qui permettent à tous les pèlerins de sʼabreuver de cette eau extraordinaire.
Boire de cette eau, cʼest se reconnecter au monde des anges et de la prophétie. Invisible normalement au commun des mortels, cʼest bel et bien lʼAnge Gabriel qui était présent auprès dʼIsmaël, lors du jaillissement de la source. Cette eau, qui nous vient du Paradis, sauva ce jeune prophète et toute sa famille
Par conséquent, Zamzam n’est pas uniquement de l’eau jaillie d’une source, elle raconte aussi une histoire. Celle d’une foi sincère, dévoilée à tous ceux qui s’y abreuvent. Elle célèbre l’épopée de la merveilleuse et courageuse Hajar. C’est un témoignage vivant, non pas écrit ou oral, mais plutôt visible, palpable, qui permet aux pèlerins de méditer sur ce modèle de confiance absolue en Dieu.
Et c’est bien cet épisode que revisitent les pèlerins pendant ce que l’on appelle le Sa’iy, une des étapes incontournables de leur voyage.
Ensemble, derrière Hajar
Le Sa’iy est un rituel qui consiste à marcher rapidement (et même à courir un peu) entre Safa et Marwa, les deux petites collines situées dans un espace dédié, à lʼintérieur du Masjid El Haram. Les musulmans, femmes et hommes, doivent parcourir 7 fois le trajet entre ces deux points, pour refaire symboliquement le même périple que Hajar.
Le Sa’iy est un temps de profonde réflexion sur sa présence au monde. Ce mouvement de va-et-vient représente le voyage terrestre, la course de la vie, ses trajectoires, ses étapes et ses difficultés. Nous vivons tous des hauts et des bas, symbolisés par les collines. Et comme pour Hajar, à force de persévérance et dʼinvocations, au bout de la course, il y a la promesse dʼune terre meilleure, pleine de joie et dʼabondance.
Tous les pèlerins, lorsquʼils expérimentent les rituels du Hajj (grand pèlerinage) ou de la Omra (petit pèlerinage), sʼidentifient soit à Abraham, un homme, soit à Hajar, une femme. Tous les deux sont des modèles dʼune foi sincère et authentique en Dieu. Entre Safa et Marwa, chaque personne, quels que soient son âge, sa couleur ou encore son genre, marche derrière les pas de Hajar, afin de sʼinspirer de sa force et de sa bravoure.
Leçons de vie à travers le récit de Hajar
Que nous enseigne Hajar lors de cet épisode si particulier du Sa’iy ? Probablement, le courage d’agir. Bien quʼétant très inquiète pour sa survie et celle de son enfant, elle ne sombre pas dans un désespoir paralysant. Elle choisit de se mettre debout, en mouvement. Elle se met en marche, elle court même. Inlassablement, et en véritable mère courage, elle recherche des solutions, échoue et recommence, encore et encore. Résistante contre la fatalité, elle refuse lʼimmobilisme et choisit lʼaction, en persévérant dans lʼeffort.
L’histoire de Hajar invite donc tous les musulmans, sans exception, à développer cet état d’esprit de la détermination, quelles que soient l’intensité et la gravité des difficultés que l’on rencontre. Avec toujours cet espoir du secours divin, immensément invoqué.
Extrait du livre « Le pèlerinage » de Amel Ayan