Islam et Occident : Entre Méconnaissance et Conflits Historiques
L’Islam, une voie vers l’équilibre et la sérénité
L’Islam est une conception harmonieuse et équilibrée de la vie. Les personnes l’ayant adopté en restent émerveillées et le considèrent comme la plus sereine et la plus humaine des conceptions de la vie. Elle consiste à savoir que tout ce qui m’arrive est le résultat de la volonté consciente de Dieu, inscrit dans un plan universel. La conséquence pour chaque musulman en est un sentiment profond de sécurité.
Dieu est Un et sa création est unité. Notre esprit n’a pas à faire d’acrobaties philosophiques pour croire en des dogmes incompréhensibles. C’est aussi un système de vie concret, complet et agréable à la constitution psychologique de l’être humain. Par une complète coordination des aspects spirituels et matériels, chacun aspire à sa perfection individuelle dans cet ordre parfait.
Seul l’Islam affirme que cette perfection est possible. Le moyen d’y arriver est le respect de ses caractères originaux et le développement de ses qualités et pouvoirs innés tout au long de sa vie. En effet dès le départ, chaque être humain naît avec un penchant naturel vers le bien et le cadre de vie aide alors chacun à se réaliser.
En Islam, l’aspect matériel fait partie de l’adoration, et la femme comme l’homme ne sont pas contraints de renoncer au monde. La vie terrestre est en effet considérée comme une entité positive. Elle est une étape sur notre route vers une existence supérieure et ne doit par conséquent pas être sous-estimée.
La vie est donc vécue avec éthique. La haine raciale ne fait pas partie de son répertoire. Il en est de même pour la notion de classe sociale, ce qui fait qu’il n’existe pas de lutte des classes. L’objectif est de vivre en société avec un minimum de conflits internes et un maximum d’authentiques sentiments fraternels.
L’Islam est positif, optimiste et encourageant. Il n’incite pas seulement mais gravite autour de la réflexion et de la recherche du savoir, de la science et du progrès. Dieu a appris « les noms » à Adam et c’est son savoir et sa raison qui l’ont rendu supérieur aux anges.
La liberté en Islam vient justement de notre raison qui vérifie que rien n’est imposé à l’esprit humain. Après avoir reçu ses commandements l’esprit humain en fait naturellement sien grâce à sa raison. La pratique permet de vivre dans un état de conscience intérieure et d’éveil, d’agir par notre raison et non par habitude, passion ou hasard.
Enfin rappelons que la croyance ou la non-croyance n’est pas question d’arguments mais d’intuition. Celui ou celle qui a choisi l’Islam l’a fait en réponse à cette voix intérieure dans son cœur qui le ou la ramenait toujours à cette question du sens.
Ainsi les musulmans décrivent-ils l’Islam comme une œuvre architecturale parfaite dont toutes les parties jouent un rôle et se complètent harmonieusement. Par les spécialistes, même non musulmans, l’énergie de l’Islam est reconnue comme étant la plus grande force motrice que l’humanité ait jamais connue. Mais pour l’occidental(e) lambda, l’Islam provoque soit la peur, soit le mépris. Comment se fait-il que l’on puisse penser ainsi ?
L’Islam à travers le Prisme Occidental
Les occidentaux comme tous les êtres humains ne peuvent pas s’expliquer le mystère de la vie et de la mort. Cependant il est donné en Occident en guise de réponse à peu près ce qui suit : on ne peut se baser que sur des preuves tangibles, et donc ces dernières étant ignorées, nous ne savons pas (encore) d’où nous venons et où nous allons. La conséquence en est l’angoisse existentielle, la perte de repères, la sensation de néant, les questions sans réponses, et ses suites psychologiques, pathologiques et sociétales qui n’existent pas ailleurs qu’en Occident.
De plus l’Occident a longtemps subi le dogme chrétien enseignant aux Hommes qu’ils naissaient porteurs du péché originel, que leur corps charnel relevait du domaine du diable, qu’ils devaient attendre la rédemption universelle, qu’il fallait se soumettre passivement au mal infligé, que Jésus était mort sur la croix (1)…Tout ceci a laissé en héritage chez chaque occidental(e) un sentiment inconscient de mauvaise conscience dans sa jouissance de la vie, qui a même mis parfois une barrière entre l’homme et sa légitime envie de vivre.
Ce christianisme avait imposé un modèle à celui qui instinctivement espérait le salut, il s’agissait du saint ascète et de la suppression des différences individuelles.
Enfin l’Eglise a présenté Jésus comme étant le fils de Dieu, ce qui n’a pas été compris au sens philosophique par le commun des hommes. Dieu – a lui la Louange et la Pureté- a par ailleurs été réduit et représenté par un vieil homme à la barbe blanche, mythe auquel les générations nouvelles n’ont évidemment pas voulu se soumettre.
Ce fardeau a donc été mal supporté puis mal surmonté par l’Occident moderne et contemporain qui est tombé dans l’autre extrême, s’est mis à adorer la vie, en profiter sans limites mais aussi sans respect aucun pour elle. Malgré tout, cela ne l’a pas aidé à trouver le Bonheur.
Actuellement la seule religion de l’Occident est l’adoration du progrès matériel et du confort personnel. Le but de la vie est de se faciliter continuellement la vie. Pour ce faire il faut maîtriser la nature. Tous les efforts qui sont déployés à grande échelle vont alors dans le sens utilitariste.
Ce qui en Islam était un moyen pour l’homme, est dans cette conception le but de la vie. Et le grand regret est que le système occidental assimile le progrès scientifique et matériel à l’amélioration spirituelle et morale. Cette croyance demeure consistant à dire qu’au fil du temps, grâce au progrès technique, une amélioration collective de l’humanité s’effectue. Or en Islam par exemple, l’amélioration est demandée à chacun au cours de sa vie car on ne considère pas que l’âme humaine, qui n’est pas une quantité biologique, s’améliorera par l’accumulation des générations, comme s’amélioreraient les connaissances scientifiques. Il n’y a qu’à voir les guerres qui apparaissent de plus en plus, les crimes, l’individualisme, la course au pouvoir, les maladies, les injustices et les inégalités.
Les vraies racines dont l’Occident Européen puise ne sont finalement pas chrétiennes comme nous l’avons vu, encore moins judéo-chrétiennes, mais bien gréco-romaines et plus particulièrement romaines et païennes.
Il faut savoir que l’Empire Romain qui s’est déployé sur de vastes territoires et des populations hétérogènes, a mis 1000 longues années pour enfin atteindre son paroxysme géographique et politique mais on rappelle peu souvent qu’il n’a pu y arriver que grâce aux invasions, guerres, esclavage et qu’il s’est rapidement défait en quelques 100 ans. Même s’ils ont gardé des bribes de divinités provenant de leurs prédécesseurs grecs, les romains ne leurs donnaient pas de rôle dans la sphère publique car leur conception de la vie était profondément matérialiste. De plus les Romains se considéraient comme étant les seuls « civilisés », tout le reste étant dit « barbares ». Cette représentation du monde en deux parties est restée ancrée dans l’inconscient collectif. Depuis il faut admettre qu’un(e) occidental(e) croit que sa supériorité par rapport à une personne appartenant à une autre civilisation est une vérité. Par ailleurs actuellement les nations non occidentales ne sont considérées qu’à partir du moment où elles ont un apport direct aux destinées de l’Occident. On finit par y croire qu’il n’y a que l’Occident.
Après cet héritage romain, l’Eglise a eu la mainmise sur la pensée et les libertés, jusqu’à la période de respiration appelée Renaissance où l’Homme est devenu le centre des préoccupations. Les sciences, les arts, la culture se sont développés. Une des raisons est que l’Europe Moyenâgeuse a découvert une civilisation musulmane raffinée, progressiste, pleine de passion, cultivée, avec sa science et sa philosophie développée à partir de la pensée grecque et de la Révélation, et cette découverte a participé à créer un élan et un renouveau en Occident qui est sorti de son obscurantisme, sans avouer ses sources en partie islamiques. Puis au 18è siècle l’Eglise fut balayée par la Révolution française.
Mais pour comprendre pourquoi l’imaginaire occidental a une autre vision de l’Islam que celui des Lumières et de la Liberté il faut se pencher sur l’époque malheureuse des croisades durant laquelle l’Eglise chrétienne s’est lancée dans une conquête guerrière, violente et sanglante du monde pour le christianiser.
Les entraves à la conception de l’Islam
La mauvaise compréhension de l’Islam vient du fait que ses principes ne sont pas seulement ignorés par la majorité, mais qu’ils sont étrangement déformés et faussés.
On aime mettre en exergue les fondements gréco-romains de notre société. Cet empire est admiré alors qu’il était basé sur l’exploitation des autres en faveur de la mère patrie, alors qu’il n’a pu arriver à se développer qu’à travers la violence, les injustices, l’esclavage, y compris à l’égard des femmes. Comment cela a-t-il curieusement pu être oublié ?
On rapproche alors souvent l’Empire Romain de l’Empire Islamique. Mais en réalité en dehors de leur étendue territoriale ils sont à l’opposé l’un de l’autre. L’Empire Islamique n’a mis, lui, que 80 ans à atteindre son apogée et plus de 1200 ans à perdre un peu de son énergie tout en demeurant bien vivant encore de nos jours. L’exemple force à méditer.
En Europe il est admis et connu de tous que la Renaissance a inauguré l’ère moderne après l’obscurantisme du Moyen-âge, mais personne ne dit comment elle est arrivée. Dans la pensée commune mais aussi dans les manuels scolaires on ne dit pas assez que cette impulsion est venue en grande partie de la rencontre avec les musulmans. Une simple recherche dans des ouvrages d’histoire spécialisés le révèle.
Tout ce qui vient d’être dit n’explique pas l’animosité que l’Occident a envers l’Islam plus particulièrement. Il faut en effet chercher la réponse dans l’épisode historique des Croisades. L’animosité de l’Occident envers l’Islam seul est née bel et bien des Croisades. Paradoxalement l’Eglise a réussi à convaincre et entraîner avec elles les populations qui justement lui reprochaient tous ses maux et se révoltaient contre elle, en leur présentant l’Islam de manière déformée afin de légitimer ce massacre puis d’asseoir son pouvoir. Les populations ont cru à la supercherie de l’Eglise qui a monté et uni les nations pour vaincre cette autre religion dont elle a donné une description fausse afin de continuer ses exactions. La haine envers cette religion plus récente, plus juste, plus libre, plus humaine, mais surtout leur jalousie envers une religion plus aimée de ses adeptes et certainement concurrente a poussé les croisés à appeler le prophète non pas par Mohammad mais Mahomet, qui signifie en langue arabe le contraire de son sens originel ; « Le loué » a été appelé « Le non loué ». Ils ont dépeint l’Islam comme une religion formelle, violente ce qui a été cru à la grande joie des croisés et ce préjugé subsiste depuis dans l’imaginaire des gens.
Et là réside la clé du mystère : la première fois que les nations européennes se sont unies et ont dépassé leurs frontières, cela a été en vue d’une union contre le monde musulman, en soutien au fantasme belliqueux de l’Eglise. L’« Europe » moderne est née de l’esprit des Croisades. Ces guerres farouches envers ceux même dont ils ont tant appris. Ils ont ensuite encouragé l’Espagne, alors à son apogée culturelle, à combattre sa propre population musulmane par une persécution des plus féroces et des plus impitoyables. Cette guerre a duré des siècles ce qui a d’autant plus contribué à alimenter la haine et l’enraciner en Europe. Les Croisades ont duré leur temps puis les territoires conquis ont fini par être perdus. En outre l’Europe n’a pas supporté l’idée que Constantinople devienne musulmane alors qu’elle représentait pour elle le prestige de la Grèce et de Rome, donc son prestige tout entier.
Arrive ensuite l’époque de ceux que l’on appelle les orientalistes. Censés être des spécialistes de l’Islam, observateurs, dans une démarche intellectuelle, ils étaient en fait au départ missionnaires chrétiens dans les pays musulmans. Par la suite les orientalistes ont en réalité étudié le monde musulman dans le but de le coloniser et de légitimer leur invasion auprès des intellectuels honnêtes restés en Occident susceptibles de dénoncer ces injustices par une déformation de la réalité de l’Islam et des musulmans. C’est ainsi qu’au 20è siècle, il n’y pas si longtemps, époque de la modernité, l’Occident était encore en train de coloniser les pays musulmans, dominant les « indigènes » et profitant de leurs terres et des richesses.
Actuellement la pensée occidentale moderne d’une part n’arrive pas à se détacher de son propre vécu, ses traumatismes internes, ses postulats infondés et essaye de comprendre cet Islam à partir de ses outils biaisés ou en comparaison avec la seule religion qu’elle connaît, le christianisme déformé. Or comme il l’a été démontré le rapport à la vie, au corps, aux biens, à l’humanité sont tellement différents entre les deux que la comparaison est mauvaise et trompeuse.
D’autre part les musulmans qui depuis des siècles se sont éloignés de leur vraie religion n’en sont plus ni de fidèles représentants ni de fin connaisseurs. Leur décadence, leur analphabétisme et leur misère matérielle les ont éloignés de leurs sources sacrées.
Enfin les occidentaux eux-mêmes ne sont pas sensibilisés et ne portent pas un regard critique sur les fondements premiers de leur propre système. La société les poussant à ne se soucier que de leur capital et de leur bien-être ils n’en connaissent ni les bases, ni l’histoire, ni les objectifs supérieurs. Faire des amendements ça ou là par des personnes honnêtes n’en changera pas moins les bases.
Les fausses accusations persistantes contre l’Islam méritent d’être dénoncées. Libérer les consciences occidentales afin qu’elles puissent regarder cette foi de manière holistique et impartiale représente également un combat pour que chaque individu acquière un droit fondamental.”
(1) Précisons qu’en parlant de christianisme il ne s’agit pas de la pratique première de Jésus et de ses apôtres, qui était parfaite et agréée de Dieu mais qui n’existe plus en raison des falsifications historiques des textes.
A partir de l’ouvrage L’Islam à la croisée des chemins (Islam at the Crossroads) rédigé en 1934 par Léopold Weiss allias Muhammad