Les grands lecteurs du Coran : l’imam ‘Assim
La personnalité dont nous allons parler dans cet article du nom de ‘Assim est l’un des sept grands imams des lectures coraniques.
L’imam Ach-Chatibi l’a classé en cinquième position des sept grands lecteurs, et en première des trois grands lecteurs koufis, de la région de Koufa, grande ville du monde musulman de l’époque.
Connaître sa biographie est important dans la mesure où l’une des riwayah (version de lecture coranique) que nous avons reçue de lui est la plus répandue dans le monde musulman aujourd’hui : celle transmise à son élève Hafs ibn Soulayman al-Koufi.
Voici donc une présentation de la biographie de l’Imam ‘Assim recueillie au travers de plusieurs références, notamment l’encyclopédie siyar a‘lam an-noubalaa écrite par l’imam adh-Dhahabi et le livre biographique Tabaqaate al hanabilah.
Son nom, son origine et ses maîtres
Le grand imam ‘Assim, Professeur Enseignant de Coran de l’époque (Mouqri en arabe), de son surnom Abou Bakr et appartenant à la tribu des Bani Assad de Koufa, est né durant le gouvernorat de Mou’awiyah ibn Abi Sofyan.
Le nom de son père est Bahdalah, il y a d’autres avis moins considérés qui disent que Bahdalah est le nom de sa mère (ces dires ne valent même rien, a tranché Adh-Dhahabi).
Cela explique pourquoi beaucoup de biographies ou de savants préfèrent appeler le père de l’imam ‘Assim par son surnom (kounya) « Abou an-Najoud ».
Il faut noter que l’Imam ‘Assim ibn Abi an-Najoud est considéré comme lié à la tribu des Bani Asad sans être originaire de cette tribu, ni même d’origine arabe. On utilise en arabe le mot mawla (pluriel mawali) pour désigner une personne dont les origines sont non arabes.
L’imam ‘Assim récita le Coran auprès de Abou ‘Abd ar-Rahman as-Soulami et Zirr ibn Houbaych al-Asadi, et il rapporta aussi des hadiths d’après eux, ainsi que d’après Abou Wa’il, Mous‘ab ibn Sa‘d et une partie des grands Tabi‘ines.
Il a rapporté, également, des hadiths de al-Harith ibn Hassan al-Bakri, et Rifa‘ah ibn Yathribi at-Tamimi (ou at-Taymi), qui sont considérés tous les deux comme compagnons du Prophète (paix et bénédiction sur lui).
L’imam ‘Assim est donc compté parmi les Tabi‘ines « mineurs » qui est la plus jeune génération d’élèves de Compagnons, qui connurent ces derniers durant leur enfance ou leur jeunesse.
Il commença l’enseignement du Coran à Koufa (iqraa), et le fit réciter à plusieurs élèves dont les deux plus grands connus sont :
– Abou Bakr ibn ‘Ayyach, plus connu sous le nom de Chou‘bah
– Hafs ibn Soulayman, qui a transmis la riwayah (version de lecture) la plus répandue dans le monde musulman aujourd’hui.
Ainsi qu’à d’autres grands savants comme al-Moufaddal ibn Mohammad ad-Dabbi, Soulayman al-A‘mach…
L’imam Hafs raconta que ’Assim lui dit : « La lecture par laquelle je récitais à Abou ‘Abd ar-Rahman est celle par laquelle je t’ai enseigné, et la lecture par laquelle j’ai enseigné à Abou Bakr ibn ‘Ayyach est la lecture que j’ai récitée devant Zirr d’après Ibn Mas‘oud ».
Ceci veut dire que la riwayah de Hafs d’après ‘Assim que nous utilisons de nos jours est issue directement de ‘Ali ibn Abi Talib, par l’intermédiaire de Abou ‘Abd ar-Rahman ; quant à la riwayah de Chou’bah d’après ‘Assim elle est imputée à Ibn Mas‘oud.
L’imam ‘Assim finit par diriger l’enseignement du Coran (iqraa) après le décès de son professeur et maître Abou ‘Abd ar-Rahman as-Soulami.
Chou’bah dit : « Lorsque mourut Abou ‘Abd ar-Rahman, ‘Assim se mit à enseigner aux gens à sa place. Et il avait la meilleure voix parmi eux en ce qui concerne le Coran ; si bien qu’il semblait avoir dans son gosier une clochette ».
Pour illustrer cette chaine lumineuse de transmission du coran liant l’imam ‘Assim au Prophète Mohammed, paix et prière sur lui, voici un organigramme :
Les textes suivants représentent des témoignages de très grands savants, qui font référence à ses qualités remarquables, par son bon comportement, sa maîtrise du Coran et sa grande science.
Son excellence
L’imam Chou’bah a dit : j’ai entendu Abou Ishaq dire : « Je n’ai jamais vu de meilleur lecteur que ‘Assim ».
Son éloquence
Yahya ibn Adam a dit : al-Hasan ibn Salih a dit : « Je n’ai jamais vu plus éloquent que ‘Assim ibn Abi an-Najoud ; lorsqu’il parlait, la vanité aurait pu presque le toucher ».
Une expression signifiant que son éloquence était prodigieuse.
Salamah ibn ‘Assim a dit : « ‘Assim ibn Abi an-Najoud disposait de moralité, dévotion, éloquence et d’une belle voix ».
Le respect de ses maîtres envers lui
‘Affan a dit : Hammad nous a raconté : « ‘Assim ibn ’Abi an-Najoud nous a informés, il dit : Je n’allais jamais chez Abou Wa’il en voyageant, sans qu’il n’embrasse ma main ».
Abou Wa’il Chaqiq ibn Salamah de la tribu des Bani Asad était l’un des maitres de ‘Assim, il fait partie des plus grands Tabi‘ines de Koufa.
Il a côtoyé les plus grands Compagnons du Prophète (paix et prière sur lui) et devint par la suite le grand imam et le cheikh de Koufa. Il est mort en l’an 110 de l’Hégire.
Ainsi ce texte illustre que ‘Assim, était très respecté par son propre maître, et démontre qu’il était pourvu de qualités exceptionnelles impliquant un tel respect.
L’une des lectures préférées de l’imam Ahmad
‘Abd Allah ibn Ahmad ibn Hanbal a dit : « J’ai posé la question à mon père à propos de ‘Assim ibn Abi an-Najoud, il dit : C’est un homme pieux, bienfaiteur, disposant d’une grande intégrité et fiabilité. Je dis : laquelle des lectures aimes-tu le plus ? Il dit : La lecture des gens de Médine, et si elle n’est pas disponible, la lecture de ‘Assim ».
Sa maîtrise du Coran
Abou Kourayb a dit : Abou Bakr (Chou’bah) nous a raconté : « ‘Assim m’a dit : J’ai été malade deux ans, et lorsque je fus rétabli, j’ai récité le Coran et je ne me suis pas trompé d’une seule lettre ».
Minjab ibn al-Harith a dit : Charik nous a raconté : « ‘Assim était un homme de hamzah, de madd et d’une lecture rigoureuse ».
Cela signifie que sa lecture se caractérise par l’omniprésence de la hamzah, de la multiplicité des allongements de plus de deux temps, et faisait preuve d’une grande rigueur dans la récitation.
Sa patience
L’imam Chou’bah a dit : « Assim était un grammairien, éloquent lorsqu’il parlait, dont les paroles étaient connues et célèbres. Et lui, al-A‘mach et Abou Housayn al-’Asadi étaient aveugles ».
Un jour, un homme vint guider ’Assim, qui fit alors une violente chute. Il ne le réprimanda pas, et ne lui dit rien du tout.
Sa formation durant la jeunesse
Hammad ibn Zayd a rapporté d’après ‘Assim, qui dit : « Nous venions (apprendre) auprès de Abou ‘Abd ar-Rahman as-Soulami, alors que nous étions des enfants presque pubères (pré-adolescents). »
Adh-Dhahabi commenta ce texte : « et ceci illustre qu’il récita le Coran à as-Soulami durant son enfance ».
L’importance de la langue arabe dans la maîtrise des lectures coraniques
Abou Bakr Chou’bah dit : « ‘Assim dit : Celui qui ne maîtrise l’arabe que d’une seule voie, ne maîtrise rien du tout. Puis il dit : Personne ne m’a jamais enseigné un seul dialecte sauf ’Abou ‘Abd ar-Rahman, qui avait récité à ‘Ali – que Dieu l’agrée -. Et je revenais chaque fois de chez lui pour réciter à Zirr ibn Houbaych. Et Zirr avait récité à Ibn Mas‘oud. Je dis alors à ‘Assim : « C’est ainsi que ta confiance a été attestée. »
Yahya ibn Adam a rapporté cela, d’après Abou Bakr, puis il dit : « Je ne compte plus combien de fois j’ai entendu Abou Bakr rappeler cela d’après ‘Assim ».
Sa piété et son ascétisme
Ziyad ibn ’Ayyoub a dit : Abou Bakr nous a raconté : « Lorsque ‘Assim priait, il se redressait comme s’il était un bâton, et il restait le vendredi à la mosquée jusqu’au ‘Asr. Il était un généreux ascète qui priait constamment. Il arrivait que lorsqu’il avait une chose à satisfaire, et qu’il voyait une mosquée, il se disait : laissons tomber, notre besoin ne prendra jamais fin. Il entrait alors dans la mosquée puis priait ».
Sa rigueur dans la lecture coranique
L’imam Chou’bah a raconté à Ibn al-Moubarak : « J’ai récité le Coran à ‘Assim ibn Abi an-Najoud, il me demandait de lire chaque jour un seul verset (pas plus), et il me disait, comme ça le Coran sera plus maîtrisé. J’avais peur qu’il décède avant que j’aie fini ma récitation. J’ai donc insisté longtemps jusqu’à ce qu’il m’autorise à lire 5 versets par jour.
Abou Hicham ar-Rifa‘i a dit : Yahya nous a raconté : Abou Bakr (Chou’bah) nous a raconté : « Je suis entré chez ‘Assim, qui s’évanouit puis reprit conscience ; il lut alors : « Ils sont ensuite ramenés vers Dieu, leur Vrai Maître », en prononçant la hamzah ; J’ai alors compris que la lecture était innée chez lui ».
Sa valeur dans la science du hadith
L’imam Adh-Dhahabi dit : les hadiths de l’imam ‘Assim se trouvent dans les six livres de référence qui rassemblent les hadiths du Prophète (prière et salut sur lui) (al koutoub as-sittah), on trouve quelques-uns avec les mêmes textes dans les deux livres de hadiths authentiques de Boukhari et Mouslim (les Sahihayn).
Adh-Dhahabi a rapporté le hadith le plus élevé (avec la chaîne de transmission la plus courte) qu’il a pu recevoir parmi les hadiths de ‘Assim ; il y a entre eux sept âmes (C’est-à-dire qu’entre l’imam adh-Dhahabi et l’imam ‘Assim existe sept transmetteurs intermédiaires) :
J’ai lu à Ishaq ibn Ṭariq,
Yousouf ibn Khalil vous a informés
7- Et Ahmad ibn Salamah m’a informé
6- Khalil ibn Badr et ‘Ali ibn Qadichah nous ont informés,
5- que Abou ‘Ali al-Haddad les a informés ; il dit :
4- Abou Nou‘aym nous a informés,
3- Abd Allah ibn Faris nous a informés,
2- Mohammad ibn ‘Assim nous a raconté,
1- Sofyan ibn ‘Ouyaynah nous a raconté,
‘Assim a dit : d’après Zirr qui dit : « Je suis venu auprès de Safwan ibn ‘Assal qui me dit alors : Qu’est-ce qui t’a fait venir ? Je dis : le désir de science. Il dit alors : « Car les Anges abaissent leurs ailes pour le demandeur de science, satisfaits de ce qu’il demanda » et il cita le hadith (du Prophète) ».
Son décès
‘Assim est décédé à la fin de l’année 127 ou durant l’année 128.
Que Dieu l’agrée et lui fasse miséricorde et le récompense de la meilleure des récompenses.